Les autorités russes ont annoncé lundi avoir placé en détention provisoire à Moscou un opposant à Vladimir Poutine qui affirme avoir été « enlevé » vendredi dernier par des inconnus en Ukraine où il était venu demander l'asile politique.        

Membre du Front de gauche, un des mouvements en pointe dans la contestation contre le régime du président Poutine, Léonid Razvozjaev « a été placé en détention provisoire » dans le cadre des investigations sur la « préparation à l'organisation de troubles massifs », a indiqué le comité d'enquête.

« Un mandat d'arrêt national a été délivré le 18 octobre contre Razvozjaev. Le 21 octobre, il s'est présenté de lui-même au comité d'enquête de Russie pour reconnaître sa culpabilité », affirme l'institution dans un communiqué.

« Il a donné des détails sur la préparation (...) de l'organisation de troubles massifs le 6 mai 2012 à Moscou », lors d'une manifestation de l'opposition au cours de laquelle de nombreux participants avaient été interpellés, ajoute le comité d'enquête.

La version des autorités contredit totalement celle de l'intéressé qui dit avoir été torturé et enlevé en Ukraine où il s'était rendu pour demander l'asile politique à la veille d'interpellations et de perquisitions en Russie dans le cadre de l'enquête.

Une vidéo en ligne postée par le site d'information russe Life News montre M. Razvozjaev lançant dimanche soir devant les journalistes à la sortie du tribunal Basmanny de Moscou : « J'ai été torturé pendant deux jours, dites-le, on m'a enlevé en Ukraine! ».

La thèse de l'enlèvement a été étayée par le bureau du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) à Kiev, où Léonid Razvozjaev était venu se renseigner sur l'octroi du statut de réfugié politique, avant d'être orienté vers une ONG spécialisée, HIAS, dans un autre quartier de la ville.

« Il a quitté le local sans jamais revenir »

L'opposant s'est rendu à cette ONG, mais lors d'une pause au cours d'un entretien avec des juristes, « il a quitté le local et n'est pas revenu », a déclaré à l'AFP une porte-parole de l'UNHCR, Olexandra Makovska.

De son côté, le ministère ukrainien de l'Intérieur a indiqué ne disposer d'aucune information sur cette disparition, tandis que les services secrets ukrainiens (SBU) ont déclaré n'avoir reçu aucune demande de Moscou pour interpeller l'opposant.

Cette affaire rappelle une autre disparition mystérieuse survenue en 2011 en Ukraine. Un Palestinien recherché par l'État hébreu avait alors été kidnappé dans un train en Ukraine pour réapparaître un peu plus tard en Israël, où il avait été placé en détention.

L'arrestation de l'opposant russe est considérée comme illégale par son avocate, Violetta Volkova, qui a indiqué que son client ne faisait « pas l'objet d'un mandat d'arrêt international » et annoncé son intention de saisir la justice.

Elle a ajouté que les aveux qu'aurait faits M. Razvozjaev, selon les autorités, pourraient avoir été extorqués « sous la torture », et a déclaré à la radio Écho de Moscou que les autorités lui avaient refusé l'accès à son client en prison.

Un autre opposant russe, Konstantin Lebedev, a déjà été placé en détention provisoire dans le cadre de la même enquête.

Ces investigations ont été lancées après la diffusion le 16 octobre par une chaîne favorable au pouvoir, NTV, d'un film qui affirmait sur la foi d'images prises en caméra cachée et d'origine non précisée que des opposants se préparaient à renverser par la force le pouvoir russe.

De nombreux détracteurs du régime au pouvoir ont vivement contesté le contenu de ce film, affirmant qu'il s'agissait d'accusations fabriquées de toutes pièces pour pouvoir s'en prendre à des opposants.