Lassés par quatre années d'austérité, les Lituaniens ont sanctionné le gouvernement conservateur d'Andrius Kubilius au profit de l'opposition de gauche lors des élections législatives dimanche, selon les résultats partiels.

Le parti populiste du Travail de Victor Uspaskich obtient 25,45%, devant le parti social-démocrate d'Algirdas Butkevicius (19,6%) et le parti conservateur du Premier ministre sortant Andrius Kubilius (10,9%), après le décompte des voix dans 897 circonscriptions sur 2.017.

Le parti populiste de droite Ordre et Justice (opposition) obtient 9,35%, suivi de l'Union des paysans et des verts (6,48%), et du parti de la minorité polonaise (6,16%).

La Voie du courage, un nouveau parti anti-pédophile créé à la suite d'un scandale de moeurs, obtient 5,33% et le Mouvement libéral, allié des conservateurs au pouvoir, 4,89%, un chiffre inférieur au seuil d'éligibilité de 5%.

Le parti du Travail et les sociaux-démocrates paraissent en bonne position pour former la future coalition mais ils auront besoin d'un allié qui pourrait être le parti Ordre et Justice.

Un second tour, prévu le 28 octobre, sera peut-être nécessaire. Lors des élections précédentes, il n'a cependant jamais modifié sensiblement les résultats du premier.

«Les pourparlers pour former la future coalition devraient commencer tout de suite mais ils ne seront finalisés qu'après le second tour», a déclaré à l'AFP Kestutis Girnius, analyste politique de l'Université de Vilnius.

Les électeurs choisissent 141 députés parmi 1927 candidats sur les listes de 18 partis. Soixante-dix parlementaires sont désignés au scrutin proportionnel sur les listes des partis et 71 dans un scrutin uninominal direct à deux tours, dans les circonscriptions où aucun candidat n'aura franchi le seuil de 50% des voix en sa faveur.

«Le second tour peut avoir une incidence sur le nombre final des mandats mais je serais très surpris si une coalition était formée autrement qu'avec ces trois partis d'opposition» (parti du Travail, parti Social-démocrate, et Ordre et Justice), a expliqué M. Girnius. «Ils ont coopéré dans l'opposition et ce serait très compliqué pour eux de travailler avec les conservateurs ou les libéraux. Pour le moment, ce n'est pas très clair s'ils auront besoin de faire appel à des partis plus petits», a-t-il ajouté.

Le chef du parti du Travail, Viktor Uspaskich, député européen et homme d'affaires controversé d'origine russe, a également évoqué la «possibilité qu'une coalition soit formée autour de trois partis au moins».

«Je pense que ce sera les sociaux-démocrates, le parti du Travail et le parti Ordre et justice», a-t-il déclaré à l'AFP.

Le dirigeant du parti social-démocrate Algirdas Butkevicius semblait de son côté déçu de ces résultats.

«Il est difficile de dire si les deux partis (social-démocrate et travailliste) seront capables de former une solide majorité pour gouverner. Nous avons besoin d'une solide majorité, faute de quoi pendant la crise, notre action risque d'être de courte durée», a-t-il déclaré à l'AFP.

La proposition d'un futur Premier ministre dépendra des négociations et des résultats finaux des élections, a-t-il par ailleurs estimé. Il a ajouté que selon ses informations, la présidente Dalia Grybauskaite pourrait s'opposer à la nomination de M. Uspaskich à la tête du gouvernement. «Dans ce cas le poste pourrait nous revenir», a-t-il estimé.

Le Premier ministre sortant, qui pâtit de sa politique d'austérité bien qu'elle ait permis à la Lituanie de sortir d'une profonde crise économique, a pour sa part estimé sur la radio lituanienne qu'il s'agissait d'un «résultat très fort et d'une sorte de victoire morale».

En 2009, en pleine crise mondiale, l'économie lituanienne s'était contractée de 14,8%. Des mesures d'austérité draconiennes du cabinet Kubilius ont permis à la Lituanie de renouer avec la croissance en 2010. Son PIB devrait augmenter de 2,5% en 2012 et le chômage est en baisse depuis le début de l'année.

La gauche a promis entre autres la hausse du salaire minimum à 1509 litas (437 euros), un impôt progressif sur le revenu et une remise à plat des relations avec la Russie, minées aujourd'hui par des exigences de réparation pour les 50 années d'occupation soviétique et une action en justice contre Gazprom qui fait payer trop cher, selon Vilnius, son gaz fourni à la Lituanie.