Le majordome du pape, dans ses interrogatoires par la justice vaticane, décrit un climat de mécontentement et une opacité, qui, a-t-il dit aux juges, l'ont poussé à agir, en recueillant et transmettant des documents secrets à l'extérieur du petit État.

«Même si la possession de tels documents est illicite (...), j'ai été incité à agir par ma foi profonde et le désir qu'on puisse faire la lumière sur tout ce qui se passe dans l'Église», s'est justifié Paolo Gabriele qui sera jugé à l'automne par un tribunal du Vatican pour vol aggravé.

Également, «la raison était de pouvoir analyser et comprendre le système, n'ayant pas la possibilité de le faire au bureau», a-t-il ajouté à propos de l'énorme quantité de documents photocopiés saisis à son domicile.

Le majordome a dit au juge d'instruction Piero Bonnet que son action avait «mûri (au Vatican) dans un contexte de malaise face à des affaires, des organismes et des personnalités» de l'Église.

«J'ai été influencé, a dit Gabriele, par des circonstances ambiantes, notamment la situation d'un État dans lequel existaient des conditions de scandale pour la foi, qui alimentaient une série de mystères non résolus et provoquaient des manifestations répandues de mauvaise humeur».

Gabriele a dit avoir contacté l'an dernier le journaliste italien Gianluigi Nuzzi à cause de son livre précédent, «Vaticano spa» (sur les finances du Vatican) qui l'avait «beaucoup frappé». Les premiers contacts ont eu lieu en octobre/novembre dernier. Nuzzi a rassemblé les documents dans son livre intitulé «Sua Santita», paru en mai.

Le majordome est apparu dès le printemps dans une émission de Nuzzi, «Gli intoccabili» («les intouchables») de la chaîne de télévision italienne La Sette, visage flouté et voix modifiée. Il a regretté devant le juge que Nuzzi ait coupé des passages de l'entretien, «en particulier ceux dans lesquels j'affirmais que mes motivations avaient toujours été de contribuer à une amélioration et jamais de nuire à l'Église et à son pasteur» (le pape).

«J'étais mû par une impulsion de faire quelque chose qui permette de quelque manière de sortir de la situation vécue au sein du Vatican. De la position où je me trouvais (dans les appartements pontificaux NDLR), je pouvais observer la double fonction papale, à la tête de l'Église et du Vatican. (...) Je me rendais compte que sur certaines choses, le Saint-Père n'était pas informé ou était mal informé».

Selon Roberto Tatarelli, un des psychologues qui a expertisé Gabriele, «son mode de pensée était caractérisé par des éléments de l'ordre de la persécution» : «plusieurs fois il a fait allusion à des complots et des machinations en faveur ou au détriment de personnages importants, soit des laïcs, soit plus fréquemment, des prélats».