Le Parti socialiste français, qui avait fustigé la volonté du gouvernement précédent de doter le pays d'une «règle d'or» budgétaire limitant les déficits, s'apprête à procéder dans le même sens.

Le Conseil constitutionnel a ouvert la voie à l'adoption de cette disposition, cette semaine, en annonçant que les mesures du pacte budgétaire européen élaboré en début d'année pour rassurer les marchés pouvaient être adoptées par Paris sans modification constitutionnelle.

La décision du Conseil facilite la tâche du président socialiste François Hollande, qui avait promis, avant son élection, d'obtenir une révision en profondeur du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) en critiquant l'importance accordée à l'austérité budgétaire.

Le TSCG prévoit que les États signataires doivent maintenir leur déficit structurel sous la barre de 0,5% du PIB et s'exposent dans le cas contraire à d'importantes sanctions financières. Seules des «circonstances exceptionnelles» peuvent justifier une dérogation à la règle. Les pays refusant de le ratifier ne pourront bénéficier, en cas de crise budgétaire, du soutien du fonds d'aide européen.

Un traité maintenant acceptable

En raison de la conclusion récente d'un pacte de croissance prévoyant l'injection à l'échelle européenne d'une somme de 130 milliards d'euros ainsi que la création d'un plan de convergence bancaire, le chef d'État français affirme qu'il est maintenant acceptable d'adopter le TSCG.

Il a demandé au gouvernement de Jean-Marc Ayrault de procéder à la rédaction d'une «loi organique» dans les plus brefs délais de manière à ce que le traité puisse être officiellement ratifié avant la fin du mois de septembre.

Si le Conseil constitutionnel avait décidé différemment, les socialistes auraient dû obtenir l'appui des deux tiers des parlementaires pour pouvoir procéder à une modification constitutionnelle.

Lors de son discours traditionnel du 14 juillet, le président avait relevé qu'il n'estimait pas nécessaire de «figer dans le marbre [des] textes» un engagement «qui est forcément pour quelques années».

Un vote aux deux tiers se serait avéré périlleux pour la gauche, qui se déchire sur la question de la voie à suivre pour permettre au pays de sortir de la crise économique dans laquelle s'enlise le continent.

Le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon demandait que les dispositions du traité soient approuvées par référendum parce qu'elles contreviennent, selon lui, à la souveraineté du Parlement français en matière budgétaire. La formation s'est dite «stupéfaite» du verdict du Conseil constitutionnel et promet de voter contre la loi à venir.

Plusieurs députés et sénateurs d'Europe Écologie - Les Verts (EELV), formellement allié aux socialistes, promettent aussi de s'y opposer. Le leader parlementaire de la formation à l'Assemblée nationale, François de Rugy, estime que le nouveau traité est «synonyme de super-austérité».

Grogne aussi chez les socialistes

La grogne touche aussi le camp socialiste lui-même. La sénatrice Marie-Noëlle Lienemann prédit que plus d'une vingtaine d'élus du parti sont susceptibles de voter contre la loi en septembre en raison de leur opposition à l'austérité.

«Je suis contre les dogmes économiques. Je suis une keynésienne qui pense qu'à certains moments, il faut des déficits et qu'à d'autres moments, il faut les réduire», a-t-elle déclaré récemment au quotidien Le Figaro pour expliquer son opposition.

Le gouvernement socialiste peut à l'inverse compter sur l'appui des élus centristes et de la droite. Ces derniers lui reprochent de s'être opposé au traité au début de l'année pour faire barrage à l'ex-président Nicolas Sarkozy.

L'ancienne ministre du Budget Valérie Pécresse affirme que le camp de François Hollande a «fait perdre un an à la France et à l'Europe» avec ses «atermoiements».

Le traité budgétaire européen a déjà été entériné par 10 pays à l'échelle européenne. Une douzaine doit l'adopter pour qu'il entre officiellement en vigueur. En plus du vote français, son sort dépendra de l'opinion de la cour constitutionnelle allemande qui doit se prononcer à son sujet en septembre.