«Liberté aux prisonniers politiques!» Ils étaient environ 2000 jeudi, place Novopouchkinskaïa, venus dénoncer les accusations de «troubles à l'ordre public» portées contre 16 opposants après des heurts avec la police, la veille de l'intronisation de Vladimir Poutine pour un troisième mandat présidentiel.

Une petite manifestation qui démontre bien que l'euphorie militante ayant enveloppé l'opposition russe au cours des derniers mois est sur une pente descendante. Comme le cycle électoral, l'élan semble bel et bien passé. Et les promesses de libéralisation du pouvoir aussi. Plus question de fermer les yeux sur les infractions commises par les anti-régime.

Malgré ce retour à la sévérité, le mouvement aura tout de même rapporté quelques fruits à une société civile embryonnaire, qui survivait tant bien que mal depuis 12 années de poutinisme. Les liens tissés lors des grands rassemblements et sur les réseaux sociaux lui auront permis d'établir des mécanismes de réaction en situation de crise.

Dernier exemple en date: lors des inondations qui ont ravagé au début du mois la petite ville de Krymsk, les «rubans blancs» - symbole de ceux qui dénonçaient les fraudes électorales - n'ont eu besoin que de quelques heures pour établir un quartier général afin de coordonner la cueillette et l'envoi d'aide humanitaire aux sinistrés. S'ils n'ont pas réussi à créer une force politique cohérente capable de concurrencer le régime, ils seront au moins devenus une force sociale.

Mais même cela, c'est trop. Car toute activité citoyenne indépendante est suspecte pour le régime Poutine, rappelle le politologue Dmitri Orechkine dans l'hebdomadaire Vlast. Une semaine après les inondations, un projet de loi était déjà en préparation pour encadrer le bénévolat. S'il est adopté, les bénévoles devront désormais signer une entente avec une organisation dûment enregistrée avant d'être autorisés à contribuer aux efforts d'aide.

Une «réforme» qui, comme les autres en cours, n'a que peu à voir avec la libéralisation promise il y a quelques mois à peine.