Le parquet de Kiev s'apprête à inculper l'ex-première ministre ukrainienne Ioulia Timochenko dans l'affaire du meurtre en 1996 d'un député, une décision qui résulte, selon le parti de l'opposante, de l'« exécution » d'un ordre du président Viktor Ianoukovitch.        

Dans une interview accordée au quotidien ukrainien Kommersant, le procureur adjoint, Renat Kouzmine, a déclaré avoir « assez de preuves » pour inculper Mme Timochenko dans l'affaire du meurtre d'Evguen Chtcherban, un député tué par balle à l'aéroport de Donetsk, où elle figure pour l'instant en tant que témoin.

« Nous avons assez de preuves pour inculper Ioulia Timochenko », notamment des « déclarations de témoins selon lesquelles elle a organisé et financé » ce meurtre, a affirmé mardi M. Kouzmine, sans préciser les chefs d'inculpation.

Le parquet attend la guérison de l'opposante transférée à l'hôpital en mai en raison de hernies discales, afin de pouvoir procéder à l'inculpation, a ajouté le magistrat, qualifiant sa maladie de « farce » et de « show politique ».

Selon lui, la victime était en conflit avec Mme Timochenko, qui s'occupait alors de la distribution du gaz russe en Ukraine et tentait de contraindre des entreprises de la région industrielle de Donetsk (est) à acheter cette matière première à sa société Systèmes Énergétiques Unis d'Ukraine (SEUU), grâce au soutien du premier ministre de l'époque, Pavlo Lazarenko.

Ce dernier est emprisonné aux États-Unis pour blanchiment d'argent depuis 1999.

Evguen Chtcherban, un potentat de la région dont le groupe était un concurrent de la société de Mme Timochenko, s'était publiquement opposé à l'expansion de SEUU, et l'a payé de sa vie, a soutenu le procureur adjoint.

Le parti de Mme Timochenko a accusé mardi le parquet général d'« exécuter » un ordre du président Viktor Ianoukovitch en augmentant la pression sur l'opposante.

Incarcérée depuis août et condamnée en octobre à sept ans de prison, Ioulia Timochenko est jugée dans une autre affaire pour fraude fiscale et détournement de fonds, et visée par plusieurs autres enquêtes judiciaires.

Mardi, le service pénitentiaire ukrainien a par ailleurs laissé entendre que l'opposante, dont le nouveau procès a dû être ajourné à plusieurs reprises en raison de son état de santé, pourrait assister à l'audience prévue pour le 25 juin.

Le ministère de la Santé, qui avait précédemment déconseillé le transport de Mme Timochenko au tribunal, a recommandé aux autorités de « créer des conditions particulièrement confortables » pour permettre à l'opposante d'assister à l'audience, selon un communiqué du service pénitentiaire.

Les poursuites contre Mme Timochenko ont provoqué une grave crise entre l'Ukraine et l'Union européenne, cette dernière considérant ces affaires comme politiques et réclamant la libération de l'opposante, qui clame son innocence.