Les Grecs sont de nouveau convoqués aux urnes dimanche dans le cadre d'élections législatives déterminantes pour le pays et la zone euro, explique notre correspondant.

Les élections législatives prévues dimanche en Grèce marqueront le moment fort d'une «révolution pacifique» susceptible d'avoir des échos bien au-delà des frontières du pays.

C'est du moins ce qu'affirme le chef de la coalition de gauche radicale Syriza, Alexis Tsipras, qui espère s'imposer devant les deux grands partis traditionnels grecs pour prendre la tête du pays et changer son cap économique.

Le Pasok et Nouvelle Démocratie «vont passer à l'histoire et être à jamais oubliés, laissant derrière eux un pays pillé et un peuple déçu», a promis hier le charismatique politicien de 37 ans qui a fait une entrée de vedette rock à une conférence de presse tenue dans un immeuble du centre de la capitale.

Syriza a créé la surprise le 6 mai en arrivant deuxième aux élections législatives, derrière les conservateurs de Nouvelle Démocratie. Malgré trois tentatives, aucune coalition fonctionnelle n'a pu être formée, ce qui force la reprise du scrutin.

Les divergences entre la coalition de gauche radicale et les deux partis traditionnels tournent autour de la suite à donner au «mémorandum» qui avait été conclu avec les autorités européennes pour assurer le versement d'une aide de plus de 100 milliards de dollars à la Grèce.

Le mémorandum prévoit d'importantes mesures d'austérité qui étouffent le pays et empêchent toute reprise économique, soutient M. Tsipras, qui a confiance en ses capacités de convaincre les créanciers de la Grèce de les réviser.

Ses opposants, qui évoquent aussi aujourd'hui la nécessité d'alléger les exigences imposées au pays, maintiennent que l'approche radicale de Syriza va amener Bruxelles à retirer l'aide restante et contraindre la Grèce à quitter l'euro.

Alexis Tsipras maintient pour sa part qu'il est temps de libérer la population grecque de ce «chantage» financier.

Son parti tire confiance notamment du fait que l'Espagne a réussi au cours des derniers jours à obtenir une injection de fonds de 100 milliards d'euros (128,6 milliards de dollars) dans son système bancaire sans être soumise au même carcan que la Grèce.

«Notre but est d'abord de conforter les personnes qui souffrent dans le pays», a relevé M. Tsipras, qui promet, en cas de victoire, de rehausser rapidement le salaire minimum et les pensions de retraite tout en révisant le système de taxation pour cibler les plus riches.

S'il parvient au pouvoir, le dirigeant de Syriza aura fort à faire, puisque la population grecque est épuisée par des mesures d'austérité qui ont eu pour effet de diminuer sensiblement les revenus.

Le plus criant symbole de cette misère se trouve au centre de la place Syntagma, dans le coeur de la ville, où un pharmacien de 77 ans s'est suicidé en avril. Dimitris Christoulas a précisé dans une note qu'il préférait mourir dans la dignité plutôt que d'avoir «à fouiller dans les poubelles» pour manger après avoir vu sa pension réduite.

Des sympathisants ont laissé des dizaines de messages sur l'arbre près duquel il s'est enlevé la vie. «L'argent est un bon serviteur, mais un très mauvais maître. Réveillez-vous!», indique un des textes.

L'instabilité liée aux élections et à une éventuelle sortie de l'euro a poussé des milliers de Grecs à sortir leur argent des banques. M. Tsipras a avancé hier que plus de 20 milliards d'euros étaient conservés dans le pays hors du réseau bancaire.

Costas Michalos, résidant d'Athènes croisé à la sortie d'une banque hier, a indiqué que l'idée de retirer ses sous «lui avait traversé l'esprit», mais qu'il y avait renoncé. «Beaucoup de gens paniquent. Il y a même des gens qui font des stocks de nourriture», a souligné l'homme de 50 ans.

«Tout bouge, personne n'est sûr de rien», a ajouté ce peintre de profession, qui entend appuyer Syriza dimanche.



LA GRÈCE EN CHIFFRES


La Grèce retourne aux urnes le 17 juin pour renouveler son Parlement. Lors des dernières législatives, au début du mois de mai, marquées par un vote anti-rigueur sanctionnant les partis traditionnels, aucun parti n'a obtenu la majorité, ce qui a forcé l'organisation d'un nouveau scrutin sous l'égide d'un gouvernement intérimaire.

Population: 10,78 millions d'habitants.

Capitale: Athènes, qui concentre plus de 4 millions d'habitants avec ses banlieues et le port du Pirée.

Langue officielle: le grec. Le turc est également reconnu comme langue de la minorité musulmane du Nord-Est, tandis que des groupes minoritaires parlent encore macédonien et valaque.

Religion: plus de 90% de chrétiens orthodoxes.

Institutions politiques: régime parlementaire avec 300 députés élus pour quatre ans et un chef de l'État, Carolos Papoulias, élu par le Parlement en 2010 pour cinq ans, aux compétences honorifiques.

Partis parlementaires sortants: Nouvelle Démocratie (conservateur), Syriza (gauche radicale), Parti socialiste panhellénique (Pasok), Grecs indépendants (populo-nationaliste), Parti communiste grec (KKE), Dimar (gauche démocratique), Aube dorée (néonazi).

- Avec AFP