La classe politique en Grèce a vivement réagi samedi après la suggestion prêtée à la chancelière allemande Angela Merkel d'organiser un référendum en Grèce sur le maintien ou non du pays dans la zone euro, en même temps que les législatives prévues le 17 juin.

Malgré le démenti de la chancellerie à Berlin, cette idée a provoqué une levée des boucliers des partis politiques à Athènes, qui viennent de lancer une nouvelle campagne électorale, la deuxième en moins de deux mois, après le scrutin du 6 mai qui n'a permis à aucune formation d'obtenir la majorité.

«Le peuple grec n'a pas besoin d'un référendum pour prouver son choix pour l'euro, dont il a déjà payé le coût en faisant des sacrifices», a déclaré Antonis Samaras, chef du parti de droite Nouvelle Démocratie, arrivé en tête du scrutin en mai.

La suggestion d'Angela Merkel «surtout dans une période électorale, est regrettable, le peuple grec a le droit d'être respecté par ses partenaires», ajoute M. Samaras, dont le parti est de nouveau favori pour les élections en juin, selon un sondage des intentions de vote publié vendredi.

«Mme Merkel a coutume de s'adresser aux dirigeants politiques de la Grèce comme s'il s'agissait d'un pays sous protectorat», a estimé Alexis Tsipras, dirigeant du parti de la gauche radicale Syriza, qui a créé la surprise au scrutin du 6 mai, se plaçant en deuxième position et quadruplant son score depuis les précédentes législatives en 2009.

«Le 17 juin, les Grecs vont mettre un terme aux politiques d'austérité et de soumission et ouvriront la voie à des évolutions progressistes dans toute l'Europe», assure M. Tsipras, dont le parti arrive de nouveau deuxième derrière la droite, selon le sondage de vendredi.

Evangélos Vénizélos, chef du Pasok, parti socialiste, a affirmé de son côté que «la question en Grèce n'était pas son maintien ou non dans l'euro, mais la sortie définitive de la crise».

«Le référendum relève de la seule compétence du gouvernement et du Parlement grec et non pas de l'Union européenne ou des gouvernements d'autres pays membres», a souligné cet ancien ministre des Finances.

La suggestion de Mme Merkel a été évoquée vendredi soir dans un appel téléphonique entre la chancelière et le président de la République Carolos Papoulias, selon un communiqué du gouvernement par intérim grec.

L'information avait été immédiatement démentie par la chancellerie allemande, qui, dans la journée, avait dit espérer que la Grèce aurait, après les élections, un gouvernement capable d'agir.

Samedi, les quotidiens grecs dénonçaient à la une «l'intervention» allemande.

«Ultimatum de Merkel», titre Ta Néa (pro-socialiste).

«Bombe Merkel pour un euro-référendum, intervention politique sans précédent», souligne Eléftheros Typos (droite).

Enfin, le quotidien financier libéral Naftémporiki parle de «bombe politique».

Angela Merkel s'était vivement opposée à l'idée d'un référendum proposée en octobre 2011 par le Premier ministre de l'époque, le socialiste Georges Papandréou, qui avait ensuite été contraint à la démission, après avoir été lâché par ses propres pairs hostiles aux mesures d'austérité, dictées par l'UE et le FMI, créanciers du pays.

Lassés par la rigueur stricte imposée depuis 2010, en échange des prêts internationaux, les Grecs ont sanctionné le 6 mai les deux partis traditionnels, droite et socialistes, tenus pour responsables de cette politique, en soutenant la montée des formations opposées à l'austérité.

D'où l'inquiétude actuelle des créanciers et des marchés, craignant un résultat similaire le 17 juin, ce qui pourrait compromettre les engagements de la Grèce vis-à-vis de ces bailleurs de fonds et alimente les menaces d'une sortie du pays de l'euro.

Wolfgang Bosbach, député de l'Union chrétienne-démocrate, parti conservateur d'Angela Merkel, a plaidé en faveur d'une sortie de la Grèce de la zone euro dans le magazine Wirtschaftswoche à paraître lundi.

Mais M. Tsipras, dans un entretien dans l'édition de samedi du quotidien International Herald Tribune (IHT), a estimé qu'une sortie forcée de la Grèce de la zone euro «allait mettre l'Europe en très grand danger».

Le Parlement grec a été dissous samedi, comme prévu, après la publication du décret présidentiel annonçant formellement le déroulement des législatives le 17 juin et la constitution du nouveau Parlement le 28 juin.