Plus de 4000 personnes arrêtées, 522 policiers affectés à la chasse aux casseurs, une enquête de 54 millions... Non, il ne s'agit pas du bilan policier des 90 jours du conflit étudiant au Québec, mais plutôt de celui des quatre nuits d'émeutes l'été dernier au Royaume-Uni. Neuf mois après les événements, la Metropolitan Police de Londres (Met) continue de pourchasser les auteurs des saccages et arrête plus de 150 personnes chaque mois.

Le 6 août 2011, une intervention policière tourne mal dans un quartier chaud de Londres: un suspect est abattu. L'incident met le feu aux poudres, et le Royaume-Uni vit quatre nuits d'émeutes, dont les dommages sont évalués à 400 millions dans la seule capitale britannique.

Durement critiquée pour sa gestion des émeutes, la police londonienne a promis de retrouver les auteurs des saccages. «Nous comprenons la frustration du public d'avoir vu des policiers ne pas intervenir lorsque des crimes étaient perpétrés devant eux, mais il n'y avait pas suffisamment de policiers disponibles pour faire face au flot de violence qui a sévi partout dans Londres», se défend aujourd'hui la Met.

Opération majeure

Déterminée à prévenir de nouveaux débordements et à redorer son blason, la police londonienne a ouvert la chasse aux casseurs en lançant une enquête majeure: opération Withern. Encore aujourd'hui, plus de 500 policiers travaillent activement à retrouver les auteurs des saccages, pour une facture dépassant les 54 millions. «Cet investissement de ressources humaines reflète l'importance de rendre responsables de leurs actes les auteurs du désordre», précise le corps policier dans un rapport sur les émeutes rendu public en mars.

Pendant les quatre nuits d'émeutes, 1144 arrestations ont été effectuées; par la suite, les enquêteurs de l'opération Withern ont appréhendé plus de 2250 personnes soupçonnées d'avoir fait de la casse. De fait, les trois quarts des arrestations ont donc été effectués après la fin des émeutes. En comparaison, en trois mois de conflit étudiant, le SPVM affirme avoir arrêté 419 personnes, dont 155 pour des actes criminels.

Une enquête «vidéo»

L'enquête de Londres repose en grande partie sur les caméras de sécurité qui tapissent la ville. À peine une arrestation sur 10 a été effectuée grâce aux méthodes traditionnelles d'enquête, comme les collectes d'indices, d'empreintes digitales ou de traces d'ADN. La Met dit avoir amassé pour 200 000 heures de bandes vidéo, soit l'équivalent de 23 ans d'images ininterrompues.

La Met publie fréquemment en ligne une galerie de photos de personnes recherchées. Encore en mai, 420 photos ont été publiées dans le but de retrouver des casseurs. En parallèle, les policiers publient la photo des accusés condamnés pour leur participation aux émeutes afin de décourager les gens de participer à de nouveaux saccages, ce que les Britanniques ont appelé le «name and shame».

La Met affiche ainsi à son tableau de chasse Andrew Burls, condamné en février à huit ans de prison pour avoir détruit deux magasins et causé à lui seul pour 2 millions de dommages. Terry Balson, 20 ans, a quant à lui été condamné à deux ans de prison pour avoir créé une page Facebook incitant à l'émeute.

En plus de cette importante enquête, la Met a procédé à un examen public de ses pratiques d'intervention. Les «Bobbies», qui ne sont pas armés, demandent maintenant de pouvoir utiliser certains dispositifs comme les pistolets à impulsion électrique et les gaz irritants. Londres songe aussi à se doter de canons à eau pour disperser les foules - un outil fréquemment utilisé en Irlande du Nord, mais jamais en Angleterre.

La Met a également révélé avoir refusé au départ d'utiliser des balles de plastique pour éviter une escalade avec les émeutiers, les policiers craignant que certains membres de gangs utilisent des armes à feu contre les forces de l'ordre.