Le premier tour de table lundi pour la formation d'un gouvernement grec a échoué avec l'annonce du leader des conservateurs Antonis Samaras qu'il s'était heurté au refus des partis anti-austérité, qui ont enregistré un succès notable aux élections de dimanche, de former une coalition.

Lundi, le chef de l'État Carolos Papoulias a confié à M. Samaras la tâche de constituer un gouvernement, en vertu de la Constitution qui réserve cette responsabilité au parti arrivé en tête du scrutin législatif de dimanche.

Premier parti avec 18,85% des voix seulement dans un parlement émietté comme jamais, la Nouvelle-Démocratie devait tenter de trouver une majorité pro-austérité et pro-Europe.

Le patron de la droite pro-austérité n'avait que trois jours pour trouver l'improbable formule magique, son équipe gouvernementale ne pouvant voir le jour qu'avec la coopération d'au moins deux autres partis, dont l'un serait forcément hostile à la cure de rigueur mise en oeuvre depuis deux ans pour juguler la crise de la dette.

Il a donc entamé lundi des discussions avec les leaders des formations ayant franchi le seuil des 3% nécessaires pour entrer au parlement, sauf avec le parti néonazi.

Sa proposition d'alliance a d'emblée reçu une fin de non-recevoir d'Alexis Tsipras, dirigeant du désormais premier parti d'opposition, le Syriza (gauche radicale), arrivé à la deuxième place aux législatives, selon lequel «il ne peut y avoir de gouvernement de salut national avec la droite qui a signé des mesures de rigueur (...), que le peuple a rejetées».

Dans la soirée, il a essuyé un deuxième refus, celui du chef de la Gauche démocratique (Dimar) Fotis Kouvelis, un nouveau petit parti de gauche pro-européen, plus modéré que le Syriza, qui a obtenu 6,10% des suffrages et a fait son entrée pour la première fois au Parlement.

À l'issue de sa rencontre avec M. Samaras, M. Kouvélis a refusé «de participer à un gouvernement de coalition droite-Pasok déguisé qui n'est pas compatible avec la volonté du peuple grec».

Quant au Parti communiste et au parti des Grecs indépendants, ils n'ont même pas accepté de le rencontrer.

Or, avec les seuls socialistes du Pasok, ex-partenaire au gouvernement depuis novembre, la ND ne parvient pas à la majorité. Le parti de l'ancien ministre des Finances Evangélos Vénizélos obtient le pire score de son histoire avec 13,18% des voix, soit 41 sièges.

Le recours indispensable à un troisième parti est loin d'être évident, car cinq des sept formations du nouveau parlement sont opposées au memorandum d'accord de la Grèce avec ses bailleurs de fonds, qui impose au pays des mesures d'austérité drastique et des réformes structurelles de fonds en échange de leur perfusion financière. Ce bloc anti-rigueur détient la majorité arithmétique du parlement, soit 151 sièges.

Un gouvernement de coalition aurait donc un caractère très fragile. Or le premier ministre grec sortant Lucas Papademos a rappelé lundi que la Grèce a besoin de «stabilité» afin de «mener à leur terme ses efforts» pour sortir de la crise.

M. Samaras a donc informé le président Carolos Papoulias de son échec et lui a restitué son mandat. «J'ai fait ce que j'ai pu pour obtenir un résultat, mais c'était impossible», a déclaré M. Samaras.

Ce «mandat exploratoire» sera remis dès demain à 11h GMT (7h heure du Québec) au dirigeant du deuxième parti, M. Tsipras qui de son côté voudrait tenter un gouvernement résolument de gauche qui veut une renégociation avec les partenaires européens de la Grèce sur les mesures d'austérité et demande qu'une partie de la dette grecque soit annulée.

Son score qui lui permet de décrocher 52 sièges au parlement a créé la surprise et traduit une forte poussée de la gauche anti austérité en Grèce.

Si lui aussi devait échouer, le mandat exploratoire sera ensuite confié au troisième parti, le Pasok socialiste. Et en cas de troisième échec, le chef de l'État convoquera les leaders des partis parlementaires pour une réunion de la dernière chance, qui peut durer plusieurs jours.

Lundi, le journal Ta Néa (centre-gauche) titrait sur un «cauchemar: l'impossibilité de former un gouvernement», en soulignant que de nouvelles élections anticipées ne sont pas exclues.

Certains médias grecs ont déjà évoqué lundi la date du 17 juin pour un nouveau scrutin, nourrissant l'inquiétude perceptible sur les marchés financiers au sujet de la Grèce, à l'aube de ces dix jours cruciaux pour le pays et la zone euro.

La Bourse d'Athènes a dégringolé de 6,6% lundi.

À Berlin, la chancelière allemande a insisté sur «la mise en oeuvre des réformes», qui revêt une «importance essentielle». Berlin continue de considérer le plan d'aide européen comme «la meilleure voie» pour une sortie de crise. Bruxelles a également appelé le pays à «respecter ses engagements».

Pour sortir de l'impasse, les responsables politiques grecs pro-austérité ont timidement esquissé la possibilité d'amender la feuille de route des ajustements exigés par les créanciers du pays.