Dmitri Medvedev a averti les Russes que son tandem avec Vladimir Poutine était là «pour longtemps», lors de sa dernière interview télévisée de président avant de permuter les rôles avec le premier ministre et ex-agent du KGB, qui revient au Kremlin pour 6 ou même 12 ans.

«Il me semble qu'il faut se détendre. Tout ça, c'est pour longtemps», a déclaré le président Medvedev, interrogé sur sa permutation avec M. Poutine, déjà président de 2000 à 2008, lors de cet entretien avec cinq chaînes de télévision.

M. Medvedev, un ancien subordonné de M. Poutine à la mairie de Saint-Pétersbourg puis au Kremlin, propulsé à la présidence russe en 2008 par son mentor qui ne pouvait légalement enchaîner plus de deux mandats consécutifs, doit à son tour prendre le poste de premier ministre début mai après avoir quitté le Kremlin.

Il a affirmé y voir un progrès démocratique qui permet que «le destin du pays, les processus politiques ne dépendent pas de la volonté d'un seul homme».

«Il me semble que c'est normal, c'est bien ça la progression vers la démocratie : deux personnes comme celles-là, trois, cinq, sept, dix», a-t-il dit.

«Nous sommes liés avec Vladimir Poutine non seulement par notre coopération politique, mais aussi par une amitié de vingt ans», a encore souligné Dmitri Medvedev.

Vladimir Poutine a été réélu à la présidence au premier tour le 4 mars pour un troisième mandat porté cette fois à six ans, et a laissé entendre récemment qu'il pourrait enchaîner au moins deux termes, soit jusqu'en 2024. Son investiture à la présidence est prévue le 7 mai.

M. Medvedev n'a jamais réellement réussi à sortir de l'ombre de son puissant aîné, de l'avis de nombreux observateurs et de la presse indépendante.

Certains ont même envisagé une répartition délibérée des rôles entre le «bon» et le «méchant», selon une tactique réputée.

Interrogé sur le cas de l'ex-magnat du pétrole et critique du Kremlin Mikhaïl Khodorkovski, emprisonné depuis 2003 et à l'égard duquel Vladimir Poutine a exprimé à plusieurs reprises son hostilité personnelle, Dmitri Medvedev s'est d'ailleurs justifié de ne pas avoir donné suite à l'intention un jour affirmée de revenir sur l'affaire.

Il a déclaré qu'il ne pouvait être question de le gracier sans qu'il en fasse la demande, une éventualité que M. Khodorkovski a toujours exclue tout comme la reconnaissance de sa culpabilité.

Le président russe, qui a incarné un temps des espoirs de libéralisation du pays, douchés lors de l'annonce en septembre qu'il renonçait à se représenter pour laisser la place à M. Poutine, a néanmoins affirmé avoir été l'homme de la démocratisation du pays.

«Le printemps est arrivé, au sens propre comme au sens figuré», a-t-il assuré. «La société a mûri, l'actuelle accélération vers la démocratie ne va pas amener le chaos, parce que la société a changé», a-t-il ajouté.

«Si l'on parle des gens qui manifestaient contre le pouvoir ou quelque chose d'autre, je respecte leurs droits, c'est absolument normal», a-t-il dit, à propos des manifestations de dizaines de milliers de personnes hostiles au pouvoir après les législatives de décembre.

Celles-ci, remportées avec près de 50 % des voix par le parti au pouvoir Russie unie, avaient été dénoncées comme frauduleuses par l'opposition, tout comme l'élection de Vladimir Poutine au premier tour de la présidentielle le 4 mars.

M. Medvedev a cependant écarté toute remise en cause des élections, assurant que les irrégularités n'avaient pu être que mineures et ne pouvaient avoir influé sur le résultat final.