Benoît XVI, à dix jours de ses 85 ans, célèbre le Vendredi saint dans une période d'inquiétude pour l'Église catholique, confrontée à la contestation de ses dogmes en matière morale et aux dangers pesant sur ses fidèles au Moyen-Orient.

De retour il y a une semaine d'un voyage au Mexique et à Cuba, le pape allemand a démarré jeudi le marathon épuisant des célébrations de la Semaine sainte, période la plus importante du calendrier catholique, qui s'achèvera dimanche avec la fête de Pâques.

Il est apparu les traits tirés, marchant à petits pas, mais spirituellement alerte et très présent.

En ce Vendredi saint, qui commémore le procès et la crucifixion du Christ, Benoît XVI devait présider une cérémonie dans la basilique Saint-Pierre, où devrait être chantée la Passion, et la traditionnelle Via Crucis (chemin de Croix) au Colisée, lieu où des milliers de chrétiens furent martyrisés dans l'Antiquité. Occasion chaque année pour mettre l'accent sur des sujets de souffrance particuliers pour l'Église et pour le monde.

Jeudi, le pape a donné la tonalité grave de ces célébrations dans deux messes: il a évoqué «la situation souvent dramatique de l'Église aujourd'hui», déplorant les appels à la désobéissance de prêtres sur les questions de moeurs, et invité les catholiques à s'abandonner à Dieu plutôt de privilégier leur «autoréalisation».

Les méditations des 14 stations du chemin de croix au Colisée ont été rédigées cette année par un couple d'Italiens, Danilo et Anna Maria Zanzucchi, du mouvement de laïcs Focolari, très apprécié par le pape pour sa spiritualité inspirée des Franciscains.

Toute leur réflexion part des remises en causes et des difficultés de la famille et du couple traditionnels dans le monde moderne, pour s'élargir à une dénonciation de l'égoïsme, du consumérisme, de l'individualisme, du non-engagement.

Cet accent correspond à un leitmotiv du pape, réaffirmé encore en Amérique latine: protéger la stabilité de la famille traditionnelle, cellule de base de la société, face à des réformes qui la remettent en cause (divorce, mariage homosexuel, etc.).

«Que de chutes dans nos familles! Combien de séparations, de trahisons! Et puis les divorces, les avortements, les abandons», dénoncent Danilo et Anna Maria Zanzucchi, selon le texte qui a été diffusé par avance dans le quotidien du Vatican, l'Osservatore Romano.

Ces méditations n'évoquent pas directement cette année les victimes de prêtres pédophiles, et ne portent qu'indirectement sur les guerres et les situations d'extrême pauvreté, si ce n'est pour exprimer la nécessité d'une solidarité concrète avec ceux qui souffrent.

La situation des chrétiens d'Orient face à l'islamisme et aux conflits, particulièrement en Syrie, est un autre sujet de préoccupation au Vatican, reflété dans les célébrations de la Semaine sainte.

Jeudi, les offrandes de la messe ont ainsi été consacrées aux Syriens victimes de la guerre, pour lesquels le pape avait fait un don de 100 000 dollars le week-end dernier.

Plusieurs évêques et religieux ont exprimé leur extrême préoccupation ces derniers jours dans les médias du Vatican, demandant l'application au plus vite du plan Annan pour un retour à la paix en Syrie.

Selon l'agence d'informations religieuses I.Media, le Vatican pourrait confirmer officiellement ces jours-ci le voyage de Benoît XVI au Liban voisin en septembre prochain. Le pape devrait y plaider pour l'entente entre confessions dans tout le Moyen-Orient.