Treize des 19 islamistes arrêtés en France lors d'un coup de filet dans les milieux intégristes, et qui avaient évoqué l'enlèvement d'un magistrat juif, ont été présentés mardi aux juges en vue d'une inculpation pour association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste.

Le président Nicolas Sarkozy a saisi l'occasion pour répéter que son credo était la tolérance zéro envers l'islamisme radical dans une France bouleversée par les tueries de Mohamed Merah, à 20 jours du premier tour de la présidentielle des 22 avril et 6 mai.

Treize des 17 islamistes qui étaient gardés à vue depuis vendredi devaient être inculpés également pour détention d'armes par les juges antiterroristes, a indiqué le procureur de Paris François Molins.

Parmi les éléments retenus contre eux figure un «projet d'enlèvement» d'un juge de Lyon (centre-est) qui n'a cependant fait l'objet d'«aucun commencement d'exécution», a ajouté le procureur.

Selon des sources proches de l'enquête, la tentative de rapt visait un «magistrat juif» qui avait suivi un dossier dans lequel un des gardés à vue a été condamné dans une affaire liée aux soins de ses enfants. Des mesures de protection ont été prises pour le magistrat et sa famille.

Ces islamistes, qui selon le ministre de l'Intérieur Claude Guéant «se réclamaient d'une idéologie extrémiste radicale, d'une idéologie de combat», ont été interpellés lors d'une vaste opération menée à Paris et en province par les services du contre-espionnage avec l'appui de la police d'élite du RAID.

Parmi eux figure le leader du groupuscule radical dissous Forsane Alizza  («Les Cavaliers de la Fierté»), Mohammed Achamlane, chez qui des armes ont été saisies. «Tous les mis en cause ont confirmé le rôle d'animateur, de coordinateur et d'émir» de cet homme, a déclaré le procureur.

Ce Français de 34 ans, qui avait récemment jugé «possible» un recours à la lutte armée «si l'islamophobie s'intensifie» selon les autorités, «réfute tout lien avec une quelconque entreprise terroriste et conteste fermement tout projet d'enlèvement», a répliqué son avocat Me Benoît Poquet.

Ce coup de filet est intervenu peu après les tueries du jeune djihadiste Mohamed Merah qui a froidement abattu trois militaires et quatre Juifs en mars dans la région de Toulouse, plongeant la France sous le choc.

Dans cette affaire, les services de renseignement ont été accusés de négligence pour n'avoir pas mieux surveillé le tueur, un délinquant devenu djihadiste, qui avait pourtant été repéré par la police.

Depuis, M. Sarkozy candidat à sa succession, a adopté une ligne de grande fermeté à l'égard de l'islamisme radical, comparant le traumatisme des Français à celui des Américains après les attentats du 11-Septembre.

«La police était sur eux (les islamistes arrêtés, NDLR) depuis quelque temps et vous verrez que, dans les semaines qui viennent, nous continuerons ce travail absolument systématique qui consiste à assurer la protection des Français en ne tolérant pas ce type d'activité», a-t-il martelé mardi sur la chaîne de télévision Canal+.

La France expulsera systématiquement ceux qui tiennent «des propos parfaitement incompatibles avec les valeurs de la République française», a également prévenu le chef de l'État.

Selon un responsable policier, «une centaine» d'islamistes radicaux sont actuellement dans le collimateur des autorités. Lundi, la France a ordonné l'expulsion de trois imams radicaux et de deux militants islamistes étrangers, et d'autres devraient suivre. La semaine dernière, le gouvernement avait interdit la venue pour un congrès islamique de quatre prédicateurs musulmans.

La gauche radicale du candidat Jean-Luc Mélenchon s'est interrogée sur le calendrier des arrestations à l'approche du premier tour de la présidentielle, mettant en garde contre une «manip de la droite».

Un sondage BVA a révélé mardi que Nicolas Sarkozy, toujours à l'aise sur les sujets sécuritaires qui avaient contribué à le faire élire en 2007, avait encore creusé l'écart au premier tour avec 29% d'intentions de vote devant le socialiste François Hollande -qui le devance cependant toujours au second.