La Russie doit renoncer à la «répression excessive» de la société, selon le programme de Vladimir Poutine en vue de la présidentielle du 4 mars publié jeudi, une promesse aux allures de concession au moment où son régime fait face à une contestation sans précédent.

«Il nous faut repenser tout le système de protection des intérêts de la société et renoncer à la tendance à une répression excessive. Cette situation déforme notre société et la rend moralement malsaine», indique le site putin2012.ru qui fixe les grandes lignes des promesses électorales de M. Poutine.

Il promet pour la période 2012-2018 -soit la durée de son mandat au Kremlin s'il est élu- que des «mécanismes réels de contrôle des activités des autorités par la société civile seront créés».

L'ex-agent du KGB a jusqu'à présent toujours cultivé l'image d'un dur, insistant sur la nécessité d'un État fort et d'une démocratie «dirigée», où le développement de la société civile n'était pas prioritaire.

Le dirigeant du parti démocrate Iabloko (opposition), Sergueï Mitrokhine, a fait part de son étonnement à la lecture de ce texte.

«Ça ressemble au programme d'un candidat qui n'occupe pas les fonctions clés de l'État. Au minimum, M. Poutine doit nous expliquer pourquoi les thèmes soulevés ici n'ont jamais été mis en oeuvre», a-t-il dit à Interfax, estimant dès lors que ces promesses resteront lettre morte.

«Je ne crois pas que ce sera mis en oeuvre, car il a l'habitude de diriger par la force», a jugé l'opposant.

Le nouveau ton de M. Poutine intervient au moment où il est confronté à une vague de protestation sans précédent depuis son arrivée au pouvoir en 2000, déclenchée par les législatives de décembre qui ont été marquées, selon des observateurs et l'opposition, par d'importantes fraudes.

Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté à Moscou les 10 et 24 décembre pour réclamer des élections libres et une «Russie sans Poutine».

Un prochain grand rassemblement est prévu le 4 février,

Les autorités n'ont pas tenté de disperser ces vastes manifestations, mais M. Poutine avait dénigré ce mouvement -comparant les opposants à des singes notamment- et a accusé l'Occident de les piloter.

Or, si le programme de M. Poutine se félicite du bilan des douze dernières années, il reconnaît que de nombreux efforts restent à faire et reprend des thèmes chers à ses détracteurs comme l'arbitraire de l'État et la corruption.

«Beaucoup de choses ne nous conviennent pas. Il s'agit du niveau de pauvreté, le mauvais climat des affaires, l'ampleur de la corruption, l'inefficacité d'une grande partie des fonctionnaires lorsqu'il s'agit de répondre aux problèmes des gens, à commencer par la sécurité des citoyens», relève-t-il.

«Les forces de l'ordre doivent protéger et soutenir les entrepreneurs agissant dans la légalité, et non pas les combattre», souligne encore le document.

Sur le front de la politique étrangère, le programme de Poutine se tient à sa ligne habituelle et promet aux Russes qu'il luttera contre toutes les tentatives occidentales d'imposer leur volonté à Moscou.

«Les mesures unilatérales de nos partenaires, ne prenant pas en compte l'opinion de la Russie et ses intérêts, feront l'objet de l'évaluation qui s'impose et d'une réaction appropriée», indique ce document, dans une référence claire aux puissances occidentales.

«Les règles du jeu de la politique et de l'économie internationale ne peuvent être déterminées dans le dos de la Russie ou en contournant ses intérêts», relève-t-il.

Vladimir Poutine compte revenir après la présidentielle de mars au Kremlin, qu'il avait dû quitter faute de pouvoir effectuer un troisième mandat consécutif après ceux de 2000-2008.

Il est le grand favori du scrutin, mais selon les derniers sondages, sa popularité est en forte baisse et il n'est pas assuré de remporter le scrutin dès le premier tour.