La plus haute instance judiciaire française a estimé mardi qu'un haut magistrat français, considéré comme proche du pouvoir, avait bien fait espionner des journalistes français dans l'affaire Bettencourt, un scandale politico-financier qui embarrasse l'Élysée.

Dans un arrêt, la Cour de cassation conclut que le procureur de Nanterre (banlieue parisienne), Philippe Courroye, a bien enfreint la loi sur la protection des sources des journalistes et avait annulé la procédure ouverte dans une enquête pour identifier les auteurs de fuites.

«L'atteinte portée au secret des sources des journalistes n'était pas justifiée par l'existence d'un impératif prépondérant d'intérêt public et la mesure n'était pas strictement nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi», a considéré la Cour de cassation.

Pour sa part, Philippe Courroye a affirmé mardi soir à l'AFP n'avoir pas commis «la moindre infraction» pénale dans son enquête, relevant qu'il s'agissait du premier arrêt de la Cour sur une loi datant de janvier 2010 concernant la protection des sources.

En septembre 2010, le procureur de Nanterre avait demandé l'examen des factures détaillées correspondant aux téléphones de trois journalistes du quotidien Le Monde.

Le chef de la police française et le chef du contre-espionnage, considérés comme étant proches du président Nicolas Sarkozy, avaient finalement été entendus par la justice en octobre dans cette enquête pour espionnage.

Le chef du contre-espionnage a été inculpé le 17 octobre, notamment d'«atteinte au secret des correspondances», de «collecte illicite de données» et de «violation de recel du secret professionnel».

L'affaire Bettencourt était née d'un différend familial entre Liliane Bettencourt, héritière des cosmétiques L'Oréal, et sa fille.

Elle a rapidement dégénéré en un scandale politico-financier, mêlant soupçons de favoritisme et de financement politique illégal, qui a coûté son poste fin 2010 de ministre du Travail à Éric Woerth. Ce dernier avait été le trésorier de la campagne de Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle de 2007.