Le président russe, Dmitri Medvedev, a menacé mercredi de déployer des missiles balistiques à Kaliningrad, aux portes de l'UE, si les États-Unis et l'OTAN continuaient de mettre Moscou devant le «fait accompli» avec le déploiement de leur bouclier antimissile en Europe.

Selon M. Medvedev, qui s'exprimait dans une allocution télévisée de sa résidence de Gorki, près de Moscou, les États-Unis et l'OTAN, qui ont entrepris de déployer en Europe un système antimissile officiellement tourné vers la menace de pays comme l'Iran, «n'ont pas l'intention jusqu'à présent de prendre en compte notre inquiétude».

La Russie, qui dit craindre que ce système ne réduise à néant sa force de dissuasion et a exigé jusqu'à présent en vain d'y être associée, sera, le cas échéant, obligée d'apporter «d'autres réponses» à cette menace, a-t-il ajouté.

Si nécessaire, «la Fédération de Russie déploiera dans l'ouest et le sud du pays des systèmes offensifs modernes, qui garantiront la destruction des installations en Europe de la défense antimissile des États-Unis», a déclaré le président.

«Une de ces mesures sera le déploiement d'une batterie de missiles Iskander dans la région de Kaliningrad», a déclaré M. Medvedev.

Les missiles Iskander sont des missiles de courte portée: leur champ d'action est de 280 kilomètres, mais peut atteindre, selon des responsables russes, 500 kilomètres dans certaines versions.

Les Etats-Unis ont opposé dès mercredi soir une fin de non-recevoir à Moscou, soulignant avoir expliqué maintes fois à la Russie que ces systèmes antimissile ne la «menacent pas».

«Nous ne modifierons ou ne limiterons d'aucune façon nos projets de déploiement», a déclaré Tommy Vietor, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, le cabinet de politique étrangère du président Barack Obama.

Le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a de son côté qualifié mercredi de «très décevante» la menace russe. Il a toutefois salué dans un communiqué «la volonté du président Medvedev de ne pas fermer la porte à la poursuite du dialogue avec l'OTAN et les États-Unis».

La Russie a déjà menacé à plusieurs reprises par le passé de déployer des missiles dans l'enclave de Kaliningrad, frontalière de la Pologne et ancien territoire allemand annexé par l'URSS en 1945, pour protester contre le déploiement du système antimissile auquel la Roumanie, la Turquie, la Pologne et plus récemment l'Espagne ont officialisé leur participation.

Moscou propose en vain de diviser le système en secteurs de responsabilité, ou à défaut de recevoir des garanties que celui-ci ne vise pas sa capacité de dissuasion, y compris en ayant accès aux installations de l'alliance pour le vérifier.

«En cas d'évolution défavorable de la situation, la Russie se réserve le droit de renoncer à toute avancée ultérieure dans le domaine du désarmement», a dit M. Medvedev, estimant qu'en définitive la Russie pouvait aller jusqu'à décider de sortir du traité de désarmement nucléaire START», signé avec les États-Unis en avril 2010.

Il a toutefois souligné que la Russie «ne fermait pas la porte» à des négociations ultérieures.

«Il reste encore du temps pour parvenir à la compréhension mutuelle», a dit M. Medvedev.

Le président russe a fait cette allocution au moment où son pays se prépare à des élections législatives à l'occasion desquelles le parti au pouvoir Russie unie, présidé par le Premier ministre Vladimir Poutine et dont il est tête de liste, ambitionne de confirmer sa domination sur le pays.

La politique intérieure russe a pris des accents volontiers nationalistes à l'approche de ce scrutin, notamment depuis que M. Poutine, président de 2000 à 2008 et qui n'a laissé le poste à Dmitri Medvedev que faute de pouvoir légalement effectuer un troisième mandat consécutif, a annoncé en septembre vouloir revenir au Kremlin à l'issue de la présidentielle de mars prochain.