Le futur chef du gouvernement italien, Mario Monti, a réclamé un peu de temps aux marchés pour former son équipe et mettre en oeuvre un programme, qui contiendra «des sacrifices», afin de récupérer la crédibilité perdue dans les derniers mois du gouvernement Berlusconi.

Après avoir reçu toute la journée des délégations politiques, il a annoncé devant la presse que les Italiens devront faire «peut-être des sacrifices», une fois qu'il aura prêté serment et lancera son programme de gouvernement.

D'autres consultations avec les partis politiques et avec les partenaires sociaux sont prévues mardi. Elles se termineront par la présentation par M. Monti d'une liste restreinte, sans doute d'une douzaine de ministres, au chef de l'État, Giorgio Napolitano.

M. Monti a commenté la nervosité des marchés boursiers et obligataires lundi, en leur demandant du temps. En «démocratie, il y a des délais précis» pour préparer un gouvernement et son programme, a-t-il souligné, se disant «certain que les marchés seront patients et comprendront».

Sa désignation par le président avait été initialement saluée par les marchés, mais l'inquiétude a repris le dessus notamment après une chute inattendue de la production industrielle en zone euro en septembre.

La bourse de Milan a terminé sur une chute de 1,99% et les taux italiens à 10 ans sont remontés à 6,7%, après avoir dépassé la semaine dernière les 7%, un niveau périlleux pour la troisième économie européenne, qui doit rembourser une dette colossale de 1.900 milliards d'euros (120% du PIB).

Le premier ministre désigné, surnommé parfois le «cardinal» pour sa prudence, devrait constituer une équipe comprenant surtout des technocrates, même s'il a souligné qu'il aimerait y inclure des «politiques». Le nouveau gouvernement doit durer jusqu'en 2013, date des prochaines législatives, a-t-il estimé.

Selon le président de la Chambre des députés, Gianfranco Fini, le nouveau gouvernement obtiendra la confiance du parlement d'ici vendredi.

M. Monti s'est engagé, une fois entré en fonction, à travailler dans l'urgence et dans le but que l'Italie «redevienne protagoniste» en Europe.

Un porte-parole du commissaire européen Olli Rehn a souligné que «même avec un nouveau gouvernement, notre diagnostic sur l'économie italienne ne change pas». L'UE, convaincue que Rome n'atteindra pas son objectif d'équilibre budgétaire en 2013 malgré les plans d'austérité adoptés ces derniers mois, a demandé notamment de nouvelles mesures de rigueur.

La «patronne des patrons» italiens Emma Marcegaglia, qui le verra mardi, a insisté aussi sur la nécessité de relancer l'économie, «car un pays qui n'a pas de croissance ne peut pas respecter les paramètres de déficit».

M. Monti, réputé pour sa compétence et son indépendance comme commissaire européen (1994-2004), représente un «changement d'époque» pour l'Italie après 17 ans de «berlusconisme», le «professeur» symbolisant «le défi du sérieux» et une «autre Italie», selon les éditorialistes.

La grande inconnue sera la longévité de son équipe. Le président Napolitano voudrait éviter des élections anticipées, car l'Italie doit placer d'ici avril 2012 pour 200 milliards d'euros d'obligations d'État.

Mais bravade ou volonté d'éviter une explosion de son parti, Silvio Berlusconi a averti que sa formation PDL, la plus grande à la Chambre des députés avec plus de 200 sièges, pouvait «retirer son soutien à n'importe quel moment» à M. Monti.

M. Berlusconi, chargé des affaires courantes jusqu'à la prestation de serment du futur gouvernement, pourrait utiliser sa capacité de nuisance si par exemple le gouvernement Monti entreprenait aussi de réviser la loi électorale.

Sur le plan économique, M. Monti devrait rapidement annoncer un nouveau tour de vis budgétaire, comme le demande l'UE.

Il pourrait notamment rétablir la taxe foncière sur la résidence principale abolie par M. Berlusconi et mettre en place un impôt sur la fortune, auquel le Cavaliere, troisième homme le plus riche d'Italie, s'est toujours opposé.

Un autre grand chantier devrait être aussi la réforme des retraites même si M. Monti devra affronter les réticences des syndicats, également défavorables à une trop grande libéralisation du marché du travail.

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