Les Irlandais votaient jeudi pour élire un nouveau président, un poste essentiellement honorifique brigué par sept candidats très différents, dont trois seulement sont issus de «l'establishment politique» traditionnel tenu pour responsable d'un déficit record du pays.

Quelque 3,1 millions d'électeurs doivent choisir leur neuvième président, qui succèdera à Mary McAleese, à la tête du pays depuis 14 ans.

Selon le dernier sondage publié le week-end dernier, l'homme d'affaires Sean Gallagher, devenu célèbre en participant à une émission de télévision, est largement en tête avec 40% des suffrages sous une étiquette d'indépendant.

Mais sa position de favori pourrait être remise en cause par une polémique lancée en début de semaine par l'un de ses rivaux, Martin McGuinness, le candidat le plus controversé de cette élection en raison de son parcours atypique.

M. McGuinness, vice-premier ministre nord-irlandais et ancien responsable du groupe indépendantiste de l'Armée républicaine irlandaise (IRA), a accusé M. Gallagher d'avoir accepté 5000 euros (7017$) d'un homme d'affaires condamné pour contrebande. Ceci afin de financer le Fianna Fail (centre, opposition) dont M. Gallagher dit avoir été «un membre sporadique».

Des accusations que M. Gallagher a catégoriquement réfutées, mais qui pourraient lui faire perdre des points, selon la société de paris Paddy Power qui donnait en tête jeudi Michael D. Higgins. Ce poète et ancien ministre de la Culture représente le Parti travailliste, formation qui participe au gouvernement de coalition.

La prise de position ouvertement anti-McGuinness affichée jeudi par le journal The Irish Independent pourrait aussi contribuer à changer un peu la donne.

M. McGuinness, donné troisième avec 15% des suffrages selon le sondage de ce week-end, «ne mérite pas le soutien des urnes», a estimé le quotidien. Il «a menti sur son rôle au sein de l'IRA et a été en permanence ambigu sur sa condamnation des atrocités conduites par l'IRA pendant les troubles», a-t-il affirmé.

M. McGuinness est accusé d'avoir participé à la lutte armée avant de se lancer dans le processus de paix, qui a quasiment mis fin à trente ans de violences en Irlande du Nord en 1998. Il se présente au nom du parti nationaliste de gauche Sinn Féin.

Sont aussi en lice pour la présidentielle quatre autres personnes: le sénateur indépendant David Norris, premier candidat ouvertement homosexuel à la présidentielle; Gay Mitchell, un parlementaire européen membre du parti Fine Gael du premier ministre Enda Kenny; Mary Davis, sans grande expérience politique; et l'ex-députée européenne et ancienne chanteuse Dana Rosemary Scallon.

Les bureaux de vote ont ouvert à 7h (2h, heure de Montréal) et fermeront à 22h (17h, heure de Montréal). À Ballyfermot, une banlieue ouvrière de l'ouest de Dublin, des mères de famille avec leurs petits dans des poussettes ont déposé dans la matinée leur bulletin dans un bureau de vote installé dans une école.

Les résultats pourraient n'être annoncés que samedi en raison de la complexité du scrutin: les électeurs classent les candidats par ordre de préférence, et leurs voix sont reportées jusqu'à ce qu'un candidat obtienne la majorité absolue.

Le vainqueur aura avant tout un rôle symbolique. Cependant, il prendra ses fonctions dans un contexte économique très difficile. L'Irlande a été frappée de plein fouet par une profonde crise économique et financière qui a obligé l'ancien gouvernement à conclure en novembre 2010 un plan d'aide de 85 milliards d'euros (119 milliards de dollars) avec l'Union européenne et le Fonds monétaire international, assorti de mesures d'économies budgétaires drastiques.

Aussitôt après, le Fianna Fail a été chassé du pouvoir aux élections de mars 2011, sur fond de désaveu du politique.