Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, dont le gouvernement vient d'accepter l'aide étrangère, a admis mercredi «des manquements» dans l'acheminement des premiers secours aux victimes du séisme de Van, tandis que des camions d'aide du Croissant-Rouge turc ont été pillés.

«Au début, dans les 24 premières heures, il y a eu vraiment des manquements, nous le reconnaissons», a dit M. Erdogan, assurant que «l'État s'est mobilisé avec toutes ses institutions» pour venir en aide aux rescapés.

Des sinistrés de la province orientale de Van ont d'ailleurs laissé éclater leur colère mercredi, critiquant la lenteur de la distribution des tentes notamment et accusant les autorités de discrimination ethnique.

La population de l'est est majoritairement kurde.

M. Erdogan a rejeté ces critiques, estimant «amplement suffisantes» les quelque 17 000 tentes envoyées aux personnes touchées par le séisme qui a fait 461 morts et plus de 1350 blessés.

Dix-sept camions d'aide du Croissant rouge ont toutefois été «pillés» par des inconnus à Van, a annoncé le directeur de cette organisation caritative à l'AFP.

La police de Van a aussi confirmé certains incidents de pillage.

Des habitants d'Ercis ont d'autre part indiqué à l'AFP que des inconnus avaient arrêté mardi un camion chargé de tentes en provenance de la province voisine d'Agri.

Ils ont battu le chauffeur et se sont emparés de la cargaison, probablement pour la revendre au marché noir, selon les résidants.

De longues files d'attente se sont formées pour réclamer des tentes devant la préfecture d'Ercis. «Ils nous traitent comme des bêtes», s'est insurgé un jeune homme tandis que fusaient des sifflets de protestation contre l'interruption des distributions.

À Guvecli, un village entièrement détruit à une trentaine de kilomètres de Van, les habitants péniblement regroupés dans quelques tentes se sont plaints d'avoir été oubliés. «Le Croissant-Rouge nous a seulement apporté dix tentes lundi» puis 25 autres mardi, selon un ancien chef du village, Zeki Yatkin.

Le gouvernement turc acceptera l'aide proposée par une trentaine de pays, y compris celle d'Israël malgré les tensions, pour faire face aux conséquences du séisme, a indiqué mercredi une source diplomatique turque. Ankara a décidé d'accepter les offres d'aide, notamment concernant des logements préfabriqués et conteneurs pour abriter les rescapés.

Un avion français transportant de l'aide humanitaire (lot de grandes tentes familiales) partira jeudi de Paris à destination de la Turquie, a annoncé le ministère français des Affaires étrangères.

À Ercis, la découverte de nouveaux rescapés continue d'encourager la recherche de survivants

Mercredi à l'aube, une enseignante de 27 ans, Gözde Bahar, a été extraite vivante des décombres, 66 heures après le tremblement de terre qui a touché cette ville de 75 000 habitants.

Quelques heures auparavant, un étudiant de 18 ans avait été extirpé en vie.

Mardi, un triple sauvetage -un bébé de 14 jours, sa mère et sa grand-mère- avait ranimé l'espoir des secouristes et des rescapés attendant des nouvelles des disparus.

Trois nouveaux survivants ont été sortis mercredi des ruines de bâtiments effondrés, quelque 67 heures après le séisme meurtrier survenu dans l'est de la Turquie. Le premier ministre Recep Tayyip Erdogan a mis en cause la mauvaise qualité des constructions dans le bilan élevé des victimes et dénoncé la négligence meurtrière de certains responsables politiques locaux et constructeurs.

Trois jours après le tremblement de terre de magnitude 7,2 qui a fait au moins 461 morts, un étudiant de 18 ans et une enseignante de 27 ans ont été sortis de bâtiments dévastés à Ercis, la ville la plus touchée. Gozde Bahar, professeure d'anglais, était blessée et son coeur s'est arrêté à l'hôpital de campagne où elle avait été évacuée, mais les médecins ont réussi à la réanimer. Une autre enseignante âgée de 25 ans a également été retrouvée par les sauveteurs.

À Ercis, ville de 75 000 habitants, les pelleteuses ont commencé à enlever les débris d'immeubles effondrés, les secouristes ayant déterminé qu'il ne restait plus de survivants dans ces bâtiments.

Mais les chances de retrouver des survivants diminuent d'heure en heure et les sinistrés redoutent une nouvelle nuit glaciale, alors que des chutes de neige sont prévues mercredi soir.

Les autorités sanitaires ont mis en garde contre le risque accru de diarrhée, l'eau courante étant contaminée.

Le pape Benoît XVI a demandé mercredi aux catholiques du monde entier de prier pour les victimes du séisme en Turquie. «Que le Tout-Puissant apporte son soutien à tous ceux qui sont engagés dans les opérations de secours», a-t-il dit.

Erdogan dénonce la mauvaise qualité des constructions

À Ankara, la capitale, Recep Tayyip Erdogan a déclaré que la Turquie n'avait pas appris assez de précédents séismes au cours desquels des personnes avaient été bloquées à l'intérieur de bâtiments qui s'étaient effondrés.

«Quand nous regardons les débris, nous voyons à quel point le matériel utilisé est de mauvaise qualité», a-t-il souligné. «Nous voyons que les gens payent le prix de béton qui s'est pratiquement transformé en sable (...) Les municipalités, les constructeurs et les contremaîtres devraient se rendre compte maintenant que leur négligence équivaut à des meurtres.»

«Malgré toutes les catastrophes passées, nous voyons que les appels qui avaient été lancés n'ont pas été pris en compte», a-t-il déploré.

Les survivants étaient en attente d'aide, alors que mardi, une forte réplique a suscité un mouvement de panique qui a déclenché une émeute dans une prison de Van, une ville située à 90 kilomètres au sud d'Ercis. Mercredi, les autorités ont transféré 350 détenus dans des prisons d'autres villes après que des prisonniers, demandant de sortir, eurent mis le feu à leur literie, selon la chaîne de télévision NTV.

Par ailleurs, les responsables des services de santé ont mis en garde contre une recrudescence des cas de diarrhée, particulièrement chez les enfants.

«Actuellement, nous n'avons pas d'autres signes de vie, a déclaré un secouriste, Riza Birkan. «Nous sommes concentrés sur la récupération de corps.»

Le tremblement de terre a frappé dimanche la province de Van près de la frontière iranienne. Plus de 2000 bâtiments se sont effondrés et 1350 personnes ont été blessées.

Près de 500 répliques ont secoué cette région depuis trois jours, selon le Centre sismologique turc Kandilli.