Le duel entre libéraux et conservateurs s'annonce serré pour les législatives du 9 octobre en Pologne, mais la relative bonne santé économique de ce pays dans une Europe secouée par la crise de la dette donne un avantage à l'équipe du premier ministre Donald Tusk.

Selon le dernier sondage, la Plateforme civique (PO) du premier ministre libéral et pro-européen arriverait en tête de ce scrutin, avec 36% des voix.

Mais il est talonné par son principal rival, le parti conservateur Droit et Justice (PIS) crédité de 32%.

En 2005, le PiS avait créé la surprise en remportant les élections législatives alors que les sondages donnaient les libéraux gagnants.

Russophobe, germanophobe et eurosceptique, ce parti est dirigé d'une main de fer par l'ex-premier ministre Jaroslaw Kaczynski, frère jumeau du président Lech Kaczynski mort le 10 avril 2010 dans une catastrophe aérienne à Smolensk (Russie).

Le petit parti paysan PSL, allié des libéraux au pouvoir, est juste au dessus du seul d'éligibilité de 5%.

Dans l'opposition, le parti social-démocrate SLD est crédité de 8% tandis qu'un nouveau parti de gauche, Ruch Palikota, résolument anticlérical, fait une percée surprenante dans la Pologne catholique avec 7% des intentions de vote.

Au pouvoir depuis 2007, M. Tusk se targue d'avoir bien géré l'économie polonaise malgré la persistance d'un chômage au dessus de 11%.

La Pologne, qui a rejoint l'Union européenne en 2004, est le seul pays de l'UE à avoir préservé la croissance en 2009. Elle se prépare à adopter l'euro, mais sans fixer de date.

Avec leur slogan «la Pologne en construction», les libéraux promettent notamment de poursuivre les privatisations, y compris dans le secteur sensible des soins médicaux.

Le parti de M. Kaczynski veut, au contraire, garder sous contrôle de l'État les plus grandes entreprises, certaines déjà partiellement privatisées comme le pétrolier PKN Orlen, l'assureur PZU ou le groupe de cuivre KGHM. Il s'oppose à toute privatisation des services médicaux.

Alors que dans «l'ancienne» Europe l'euroscepticisme ne cesse de grimper, les sondages en Pologne attestent d'un fort soutien de l'opinion à l'UE.

Or les libéraux affirment qu'ils sont mieux placés que l'opposition pour négocier les fonds européens, une opinion partagée par 51% des électeurs, selon un sondage.

Jaroslaw Kaczynski a une réputation d'eurosceptique virulent depuis une série de frictions avec Bruxelles, quand il était premier ministre de 2006 à 2007.

À l'approche des élections, il s'est efforcé de modifier cette image.

«Je suis un euro-réaliste et je suis pour une Europe plus forte, particulièrement dans les aspects politico-militaires», a-t-il déclaré à l'AFP.

Mais il dénonce «la création d'une Europe à deux vitesses» avec les 17 de la zone euro et les autres, estimant qu'elle allait préparer les Européens à «plonger dans une autre crise».

Par ailleurs, bien que la polémique sur la catastrophe de Smolensk ait perdu de son intensité, le PiS a incité des conjoints des victimes à se présenter aux élections, surfant ainsi sur l'émotion suscitée par ce drame.

La commission d'enquête polonaise a reconnu début août que les principales causes de cette catastrophe se trouvaient du côté polonais, alors qu'au sein du PiS certains parlaient de «complot» des Russes avec Donald Tusk.

Si les libéraux réussissaient à se maintenir au pouvoir, ce serait une première pour la Pologne depuis la chute du communisme en 1989.

Aussi regardent-ils avec intérêt vers leurs voisins baltes où des élections ont eu lieu récemment: en Estonie les dirigeants de centre droit ont été reconduits, bénéficiant d'un climat économique favorable, et en Lettonie l'équipe au pouvoir devrait suivre le même chemin.