L'héritière du géant des cosmétiques L'Oréal, Liliane Bettencourt, nie avoir donné de l'argent à Nicolas Sarkozy pour la campagne présidentielle de 2007 et se dit prête à la «guerre nucléaire» avec sa fille qui la menace d'une tutelle, dans des entretiens à la presse dimanche.

Mme Bettencourt, 88 ans, a été au coeur d'une tentaculaire affaire politico-fiscale à l'été 2010, née d'un conflit familial qui a débordé sur le terrain politique et conduit au départ de l'ex-ministre Eric Woerth pour des soupçons de conflits d'intérêts et de financement illégal.

Début septembre, un livre-brûlot de deux journalistes du Monde a relancé cette affaire: une magistrate y accuse le pouvoir d'avoir fait pression sur des témoins qui auraient vu Nicolas Sarkozy recevoir des sommes d'argent en liquide de la famille Bettencourt pour financer sa campagne de 2007. Des accusations rejetées comme «mensongères» par l'Elysée.

Interrogée sur la chaîne de télévision M6 pour savoir si elle n'avait jamais donné d'argent à M. Sarkozy en 2007, Mme Bettencourt répond: «Franchement, non».

«Pourquoi voulez-vous que je lui en donne?», avait-elle dit peu avant. «Pour financer sa campagne», avait alors relancé le journaliste. «Non, mais alors, il y a belle lurette avant, alors, quand il était jeune homme», avait-elle répondu, comme déroutée par la question.

En dépit des démentis de la présidence, l'affaire avait suffisamment embarrassé le pouvoir pour qu'il ait fait surveiller les communications d'un journaliste du Monde enquêtant sur ce dossier et celles de sa source. Des pratiques dénoncées par l'opposition socialiste.

L'héritière, première actionnaire de L'Oréal et troisième fortune française, promet par ailleurs de «beugler» si elle est placée sous tutelle, alors qu'un juge doit décider mardi de placer ou non sous mesure de protection Mme Bettencourt, qui souffre d'une maladie cérébrale.

Son avocat Me Jean-René Farthouat affirme, au Journal du dimanche (JDD) et à l'AFP, qu'elle est est prête à la «guerre nucléaire» avec sa fille Françoise, à l'origine de cette demande, et veut révoquer l'accord passé avec elle fin 2010 et censé mettre un terme au déchirement familial.

Ce différend avait trouvé son origine dans des procédures lancées par Françoise Bettencourt-Meyers, fille unique de la milliardaire. Celles-ci visaient l'écrivain-photographe François-Marie Banier qu'elle accusait d'avoir abusé de la faiblesse de sa mère pour obtenir près d'un milliard d'euros de dons en assurances-vie et en tableaux dans les années 1990 et 2000.

Après un accord de réconciliation très médiatisé conclu en décembre dernier, la guerre entre mère et fille avait repris en juillet, lorsque Françoise Bettencourt-Meyers avait déposé une nouvelle requête en justice, accusant le mandataire financier de sa mère de conflit d'intérêt.

Liliane Bettencourt avait répliqué en conseillant à sa fille, «un peu dérangée», de «voir un psy».

«J'ai vu Liliane Bettencourt vendredi, et elle est partisane de la guerre nucléaire. Mais nous attendons un peu avant d'engager des actions», a déclaré à l'AFP Me Farthouat.

Le patrimoine de Mme Bettencourt est scruté de près par le pouvoir politique qui s'inquiète d'une éventuelle prise de contrôle étrangère de L'Oréal, dont le géant suisse Nestlé est, avec près de 30% du capital, le deuxième actionnaire.