Le premier ministre russe Vladimir Poutine a nommé un vice-ministre méconnu du public et un proche, le vice-premier ministre Igor Chouvalov, pour remplir les fonctions du ministre des Finances démissionnaire Alexeï Koudrine, dont le départ inquiète les investisseurs.

«Après la démission d'Alexeï Koudrine, ce bloc économico-financier (...) sera supervisé par Igor Chouvalov, Anton Silouanov remplira les fonctions de ministre (des Finances) par intérim», a déclaré M. Poutine au début d'une réunion du gouvernement, selon les agences russes.

Anton Silouanov, 48 ans, quasi-inconnu du public, a fait toute sa carrière au ministère des Finances et était l'adjoint de M. Koudrine depuis 2005. Igor Chouvalov, 44 ans, est pour sa part l'une des personnes les plus en vue du gouvernement et un proche de Vladimir Poutine, l'homme fort de la Russie.   «Dmitri Medvedev a donné son accord pour l'un et l'autre. C'est notre décision commune», a précisé M. Poutine.

M. Koudrine, qui occupait le poste de ministre des Finances depuis mai 2000 et celui de vice-premier ministre depuis 2007, a été contraint à la démission lundi après s'être publiquement opposé au président Dmitri Medvedev.

Après que Vladimir Poutine et M. Medvedev ont annoncé leur intention d'échanger leurs postes en 2012, M. Koudrine a indiqué qu'il refuserait de participer à un nouveau gouvernement sous la direction de Dmitri Medvedev en raison de désaccords sur la politique économique et l'augmentation des dépenses militaires.

Le président, piqué au vif, a posé lundi un ultimatum à son ministre, démissionner dans la journée ou confirmer sa loyauté. Le ministre a été démis dans la soirée.

Le porte-parole de Vladimir Poutine, Dmitri Peskov, a affirmé que le premier ministre n'était pas intervenu dans ce différend entre le président et le ministre des Finances, démentant en substance l'hypothèse, émise par certains commentateurs, d'un conflit au sein de la direction russe.

La spectaculaire démission de M. Koudrine a aussitôt suscité des inquiétudes en Russie et à l'étranger, de nombreux experts craignant que le départ de ce spécialiste reconnu de tous ne porte un coup dur à l'économie du pays et n'effraie un peu plus les investisseurs étrangers.

L'agence de notation financière Standard and Poor's a estimé mardi que le retour quasi assuré de Vladimir Poutine au Kremlin en 2012 pourrait être un frein à la croissance à long terme de la Russie.

«Les efforts pour consolider les finances publiques, après les importantes dépenses faites lors de la récente crise économique, pourraient être compliqués avec la démission de M. Koudrine», a ajouté SP.

Celle-ci intervient à un moment où l'économie russe traverse une mauvaise passe, assistant depuis plusieurs mois à une fuite impressionnante des capitaux et à une baisse continue du rouble.

M. Poutine a d'ailleurs appelé mardi les membres du gouvernement à faire preuve de «plus de discipline» étant donné que le «pays entre dans une période assez difficile», en référence aux craintes d'une nouvelle crise économique mondiale.

«C'est malheureux qu'un ministre reconnu pour avoir maintenu la stabilité du budget soit parti», estime dans une note Ovanes Oganisian, de la banque d'investissement Renaissance Capital.

Pour Jochen Wermuth, du fonds Wermuth Asset Management, M. Koudrine a fait passer la Russie d'une «république bananière du point de vue de son endettement au statut de créancier de très haute qualité».

«C'est un point noir de plus dans le climat d'investissement déjà peu attractif du pays», a estimé le député Anatoli Aksakov, chef de l'Association des banques régionales de Russie, cité par Interfax.