Près de 20 000 fidèles catholiques ont assisté samedi à Sarajevo à la béatification de cinq soeurs, deux Slovènes, une Croate, une Autrichienne et une Hongroise, tuées au début de la Seconde guerre mondiale en Bosnie, et dont le «martyre» a été validé en janvier par le pape Benoît XVI.

«Le Saint-Père, en satisfaisant le souhait de l'archevêque (de Sarajevo), le cardinal Vinko Puljic (...), a permis avec son autorité apostolique (...) que les cinq martyres de la Drina (une rivière de Bosnie) soient désormais appelées les bienheureuses», a dit le cardinal Angelo Amato, préfet de la Congrégation pour les causes des saints du Vatican, lors d'une cérémonie eucharistique.

Trois cardinaux et une trentaine d'archevêques et d'évêques, notamment de Bosnie et de la Croatie voisine, ont assisté à la cérémonie à laquelle des fidèles ont afflué de tous les pays des Balkans.

La messe a été célébrée dans une salle de sport. «Cette salle est la plus grande église en Bosnie aujourd'hui», a lancé aux fidèles Mgr Puljic.

«Merci Saint-Père», pouvait-on lire sur une pancarte portée par des jeunes.

«C'est un grand événement pour notre Église. Nous sommes aujourd'hui une famille. C'est un pèlerinage très particulier pour moi», a déclaré Jelka Petric, 61 ans, venue de Zadar, dans le sud de la Croatie.

Les cinq religieuses vénérées, Jula Ivanisevic, Berchmana Leidenix, Krizina Bojanc, Antonija Fabjan et Bernadeta Banja ont été tuées en décembre 1941 par des membres du mouvement royaliste yougoslave.

Le décret sur la béatification validé par le pape précise que les cinq femmes ont été «tuées par haine de la foi».

À l'époque des faits, la plus jeune d'entre elles avait 29 ans et la plus âgée 76 ans.

Les soeurs avaient été expulsées le 10 décembre 1941 de leur couvent à Pale (près de Sarajevo) et ont été amenées, à travers les montagnes, dans une caserne à Gorazde (est), a raconté Mgr Puljic.

«La plus âgée a été tuée la veille de Noël alors que les quatre autres ont été enfermées le 15 décembre dans une pièce où des soldats, sous l'emprise de l'alcool, avaient tenté de les violer. Elles se sont alors jetées par la fenêtre, l'une après l'autre, puis les militaires sont descendus et les ont massacrées avec des couteaux», a rappelé le cardinal.

Selon la soeur Elvira Tadic, les cadavres ont été jetés dans la rivière Drina par un fossoyeur et «c'est pourquoi on les appelle les martyres de la Drina, qui est leur tombe», a-t-il expliqué.

Les ossements des victimes n'ont jamais été retrouvés. Un ciboire avec des traces de cinq hosties, retrouvé dans les ruines du couvent incendié, a été exposé samedi aux fidèles.

Les religieuses appartenaient à la communauté des soeurs «Filles de l'amour de Dieu», fondée en 1868 à Vienne par Franziska Lechner qui était venue à Sarajevo en 1882, pour ouvrir les premières maisons caritatives et plusieurs écoles en Bosnie.

Les cinq femmes sont les premières religieuses de leur communauté -- qui compte aujourd'hui quelque 1200 soeurs -- à avoir accédé au statut de bienheureuses.

«Par leur origine et leur mission, elles ont montré l'ouverture du coeur chrétien qui ne connaît pas les frontières humaines», a encore dit Mgr Puljic.

Sur environ 3,8 millions d'habitants en Bosnie, on compte notamment 10 % de chrétiens catholiques, 40 % de musulmans et 31 % de chrétiens orthodoxes.