Le Parti socialiste français, qui s'évertue à dénoncer haut et fort les turpitudes réelles ou supposées du gouvernement, aurait pu rêver mieux pour son image.

La formation de gauche se voit éclaboussée par la mise en examen de l'un de ses barons, Jean-Noël Guérini. Et les deux principaux aspirants socialistes à l'investiture pour l'élection présidentielle de 2012, Martine Aubry et François Hollande, se voient accusés par la droite d'avoir couvert les actions du controversé élu.

M. Guérini, qui préside la Fédération socialiste des Bouches-du-Rhône, l'une des plus importantes du parti, a été convoqué jeudi par les juges d'instruction. Ils estiment disposer d'indices suffisamment graves et concordants pour le poursuivre pour prise illégale d'intérêts, trafic d'influence et association de malfaiteurs.

Selon l'ordonnance, l'élu socialiste aurait «toléré des immixtions sans titre de son frère (Alexandre) dans le règlement d'affaires relevant de la compétence du département, à des fins de clientélisme servant leurs intérêts communs».

Le quotidien Libération affirme que M. Guérini, qui préside le conseil régional des Bouches-du-Rhône, veillait aux intérêts de compagnies détenus par son frère dans la région de Marseille. Alexandre Guérini jouait en contrepartie le rôle de «bras droit», organisant «l'arrosage» des territoires politiquement importants tout en écartant les adversaires potentiels de son frère, «au besoin en les intimidant physiquement».

Jean-Noël Guérini a annoncé jeudi après son passage au tribunal qu'il se «mettait en retrait» du Parti socialiste pour ne pas embarrasser la formation à un moment sensible. Et qu'il déléguait temporairement la plupart de ses responsabilités de président du conseil régional sans pour autant renoncer à son poste.

Il affirme être innocent et victime d'une manipulation judiciaire orchestrée par des élus de droite proches de l'Élysée qui voudraient notamment bloquer son ascension à la mairie de Marseille, depuis longtemps sous contrôle de la droite.

Tant François Hollande que Martine Aubry, qui font figure de favoris pour les primaires, ont insisté jeudi sur le fait qu'une mise en examen n'était pas synonyme de culpabilité. Ils ont parallèlement demandé que M. Guérini renonce à ses fonctions politiques en attendant que le processus judiciaire suive son cours.

Le Parti socialiste a mis longtemps à prendre ses distances avec l'élu controversé malgré les éléments qui s'accumulaient à son encontre.

À la fin de décembre 2010, le député socialiste Arnaud Montebourg avait dénoncé dans un rapport l'existence dans les Bouches-du-Rhône d'un «système de pression féodal reposant sur l'intimidation et la peur».

Martine Aubry, qui était alors première secrétaire, a ordonné une enquête interne qui n'a mené à aucune sanction contre Jean-Noël Guérini. Ce n'est qu'avec l'annonce de sa convocation et de sa mise en examen que le ton a radicalement changé, relèvent les critiques de la formation.

La droite, réagissant à la mise en examen, a cherché à mettre en relief la passivité de la direction du Parti socialiste, évoquant une «loi du silence» qui a permis à la situation de perdurer.

Jean-François Copé, secrétaire général du parti de la majorité, a déclaré qu'il ne comprenait pas comment M. Hollande et Mme Aubry, tour à tour premier secrétaire du Parti socialiste, avaient pu «mettre un masque pudique pour ne jamais aborder cette question».