L'état de santé de l'ex-Premier ministre et opposante ukrainienne Ioulia Timochenko s'est aggravé vendredi en prison en raison d'une mystérieuse maladie, a affirmé son camp, suscitant l'inquiétude des Européens qui demandent un examen médical indépendant.

«Son état s'est encore détérioré» par rapport à jeudi, a déclaré à l'AFP sans plus de détails la porte-parole de l'opposante Natalia Lyssova, laissant entendre que sa vie pourrait être en danger.

Jeudi, un avocat de Mme Timochenko a déclaré que sa cliente souffrait d'une mystérieuse maladie. Le député Olexandre Tourtchinov, bras droit de Mme Timochenko, a affirmé que des «bleus» provoqués par des vaisseaux sanguins éclatés étaient «apparus sur tout son corps».

«L'enquête ne tient pas la route, le régime ne peut pas la détruire juridiquement et nous craignons qu'il ne la détruise par d'autres moyens», a poursuivi Mme Lyssova.

Cette situation provoque de la préoccupation en Europe, où l'incarcération de Mme Timochenko, égérie de la Révolution orange pro-occidentale en 2004, avait déjà été vertement critiquée.

«Nous sommes très inquiets de l'état de santé de Mme Timochenko», a déclaré vendredi Michael Mann, le porte-parole de Catherine Ashton, chef de la diplomatie de l'Union européenne, soulignant la nécessité d'organiser un examen médical «indépendant».

Le chef de la représentation de l'UE à Kiev a demandé aux autorités ukrainiennes le droit de rendre visite à l'opposante en prison et attend la réponse, selon M. Mann.

Mme Timochenko doit pouvoir bénéficier d'un «suivi médical adéquat», a pour sa part relevé le ministère français des Affaires étrangères.

Jeudi soir, le procès de Mme Timochenko a été brièvement interrompu, l'opposante disant se sentir mal.

Le juge a ensuite annoncé une pause dans le procès jusqu'à lundi afin de permettre l'examen médical de Mme Timochenko, sans toutefois permettre à son médecin, venu au tribunal, de la voir.

Interrogée vendredi par l'AFP sur l'état de santé de Mme Timochenko, la porte-parole de l'administration pénitentiaire ukrainienne, Oksana Velkova-Lagoda, a indiqué ne pas avoir d'informations dans l'immédiat.

En revanche, cette administration a déclaré dans un communiqué que Mme Timochenko avait refusé jeudi d'être examinée par une commission médicale incluant notamment un vice-ministre de la Santé et deux docteurs en médecine.

Cette commission se rendra à la prison vendredi après-midi pour examiner l'opposante, a indiqué à l'AFP Igor Androuchko, assistant du chef de l'administration pénitentiaire.

«Les médecins sont venus rencontrer Ioulia Timochenko, mais ils ne peuvent pas la voir dans l'immédiat, car elle travaille avec ses avocats», a-t-il dit.

L'opposante insiste pour être examinée par son médecin personnel qui la suit depuis plusieurs années, a souligné son autre porte-parole, Marina Soroka.

«Nous avons vu comment le pouvoir avait falsifié l'enquête judiciaire (contre Mme Timochenko). Pouvons-nous être sûrs qu'il ne falsifie pas les résultats des tests médicaux?», s'est-elle interrogée.

Ioulia Timochenko est jugée depuis le 24 juin pour avoir outrepassé ses pouvoirs de Premier ministre en 2009 en autorisant, sans l'approbation du gouvernement, la signature de contrats sur l'importation de gaz russe à un prix trop élevé et donc très désavantageux pour Kiev.

L'opposante dénonce ces poursuites comme une répression politique orchestrée selon elle par son adversaire, le président Viktor Ianoukovitch.

La mystérieuse maladie de Mme Timochenko rappelle le cas de l'ex-président ukrainien Viktor Iouchtchenko, dont l'empoisonnement en septembre 2004 en pleine campagne électorale contre M. Ianoukovitch, le candidat favori de Moscou, n'a jamais été élucidé.