Des partisans de l'ex-Premier ministre et opposante ukrainienne Ioulia Timochenko ont entamé samedi un sit-in dans le centre de Kiev pour protester contre sa détention qui a suscité de vives inquiétudes en Europe et aux Etats-Unis.

Une centaine de personnes, dont des députés, ont installé une trentaine de tentes près du tribunal sur la principale avenue de Kiev, Khrechtchatik, affichant leur intention de rester sur place jusqu'à sa libération.

Olexandre Tourtchinov, bras droit de l'ancien Premier ministre a de son côté mis en garde contre une réédition de la Révolution orange, soulèvement populaire de 2004 qui avait porté au pouvoir un régime pro-occidental dont Mme Timochenko était l'égérie.

Le célèbre boxeur ukrainien Vitali Klitschko qui avec son frère Vladimir avait été en première ligne de la Révolution orange, et qui a suspendu ses entraînements, est rentré à Kiev pour «lutter pour la démocratie».

L'incarcération de Ioulia Timochenko «risque d'avoir pour conséquence l'isolement international de l'Ukraine qui mettra un terme aux aspirations des Ukrainiens à vivre dans un État démocratique», a souligné le boxeur dans son blogue.

L'opposante a été placée vendredi en détention provisoire par le tribunal de Kiev où elle est jugée pour abus de pouvoir, après ses remarques jugées désobligeantes à l'égard du chef du gouvernement, Mykola Azarov, qui venait témoigner.

Elle a passé sa première nuit dans le centre de détention provisoire Loukianovski où elle a été emmenée vendredi dans une camionnette autour de laquelle 200 policiers avaient été déployés pour empêcher les sympathisants de l'opposante de bloquer le passage du fourgon cellulaire.

Mme Timochenko est accusée d'avoir outrepassé ses pouvoirs de Premier ministre en 2009 en autorisant, sans l'approbation du gouvernement, la signature de contrats sur l'importation de gaz russe à un prix jugé trop élevé et donc désavantageux pour Kiev.

Selon l'accusation, ces accords ont causé à l'Ukraine des pertes de plus de 1,5 milliard de hryvnias (environ 130 millions d'euros).

L'opposante n'a eu de cesse de dénoncer comme politique ce procès qui s'est ouvert le 24 juin et a été critiqué dès le début par les États-Unis et l'Union européenne.

Les États-Unis ainsi que l'UE, la France et la Suède notamment, ont exprimé leur inquiétude après la mise en détention de Mme Timochenko.

Washington a réclamé samedi la libération immédiate de Mme Timochenko jugeant que son incarcération donnait à son procès des apparences d'une affaire «avec des motivations politiques».

«Le gouvernement américain partage les inquiétudes (de la communauté internationale) et demande que la décision sur son incarcération soit reconsidérée et sa libération immédiate examinée», selon un communiqué de l'ambassade à Kiev.

«Nous réitérons nos déclarations précédentes» concernant «les normes élevées» de droit «que nous attendons d'un pays qui aspire à une association politique avec l'UE», a pour sa part déclaré Catherine Ashton, chef de la diplomatie de l'Union européenne.

L'Ukraine est actuellement tiraillée entre les tentatives russes de l'attirer dans une union douanière avec le Bélarus et le Kazakhstan, et un accord d'association et de libre-échange avec l'Union européenne, qui a les faveurs du président Viktor Ianoukovitch.

Le chef de la diplomatie suédoise, Carl Bildt, a estimé que le procès était «un spectacle embarrassant qui portait préjudice à l'image d'un grand pays».

La déléguée nationale d'Ukraine pour les droits de l'homme, Nina Karpatcheva, a pu rendre visite à Mme Timochenko tard vendredi et a annoncé qu'elle avait été placée dans une cellule avec une codétenue.

Elle sera autorisée à avoir une télévision et un réfrigérateur si sa famille les lui fournit.

Photo Alexander Prokopenko, Reuters

Des policiers entourent l'ancienne première ministre lors de son arrestation vendredi.