L'affaire des écoutes continuait d'accaparer samedi les médias britanniques, avec une large place accordée aux premières excuses de Rupert Murdoch, mais aussi de nouvelles questions sur les liens du Premier ministre avec le groupe de presse au coeur du scandale.

Comme promis par le magnat des médias, son mea culpa s'étalait samedi sur de larges encarts payants dans sept journaux, y compris concurrents, qui notaient au passage son changement de ton et de stratégie: lui qui, jeudi encore, assurait que son groupe n'avait commis que des «erreurs mineures», a brusquement décidé de présenter des excuses publiques pour les écoutes pratiquées à grande échelle par un de ses tabloïdes, et promis de nouvelles pratiques.

«Nous sommes désolés», écrit l'octogénaire dans ces encarts, reconnaissant «les graves fautes commises».

Soucieux de donner des gages à l'opinion, il a aussi rendu visite aux proches d'une adolescente tuée en 2002, dont le téléphone avait été piraté, une révélation à l'origine d'un emballement du scandale qui ébranle son empire.

À quelques jours d'une audience hyper médiatisée devant des députés britanniques, le magnat, devenu la cible des foudres de la classe politique au Royaume-Uni, a aussi poursuivi son opération de déminage en se séparant en quelques heures de deux de ses plus proches collaborateurs: Rebekah Brooks, directrice de la branche britannique de son groupe News Corp., et Les Hinton, directeur général de Dow Jones, une filiale américaine propriétaire notamment du Wall Street Journal.

Ce lieutenant de Murdoch a dirigé sa division britannique entre 1995 et 2007, époque où News of the World est soupçonné d'avoir écouté quelque 4000 personnalités de tous horizons.

Rupert Murdoch paie au prix fort ce scandale qui l'a déjà obligé à fermer brutalement le tabloïd et à renoncer au rachat de la totalité du bouquet satellitaire BskyB, sous la pression de l'ensemble des grands partis britanniques qui font front commun contre lui.

Mais une nouvelle épreuve l'attend mardi après-midi au Parlement où il va devoir affronter avec son fils James, numéro trois de News Corp., et Rebekah Brooks les questions de la commission des médias, bien décidée à «aller au fond des choses».

«Nous allons évidemment demander des explications sur ce qui s'est passé, au sein de News of the World, mais aussi dans les autres journaux (du groupe) et jusqu'à quel niveau les dirigeants en avaient connaissance», a souligné le patron de la commission, John Whittingdale.

Cette affaire met aussi sérieusement dans l'embarras le Premier ministre David Cameron, dont les liens avec Murdoch ont été une nouvelle fois mis en évidence par la publication vendredi de la liste de ses rencontres avec les représentants des médias.

D'après cette liste, M. Cameron a rencontré 26 fois en quinze mois les dirigeants du groupe qui avait soutenu sa campagne électorale, dont Rebekah Brooks à deux reprises et James Murdoch à trois.

Il a aussi invité Andy Coulson, ancien rédacteur en chef de NotW, devenu ensuite son directeur de la communication, deux mois après sa démission pour cause de scandale en janvier.

Coulson, qui est soupçonné de «participation» à des écoutes et de «corruption», a été arrêté dernièrement, puis libéré sous caution.

L'opposition a fustigé à moult reprises le «manque de discernement» de David Cameron, d'autant que le gouvernement devait donner son feu vert à l'opération BskyB.

Il était «normal» et «humain» que le Premier ministre reçoive un collaborateur avec lequel il a travaillé si longtemps, a plaidé samedi le ministre des Affaires étrangères, William Hague, sur la BBC, assurant «ne pas être embarrassé» par ses liens avec le groupe Murdoch.