Les plus grandes économies du monde ont accepté, jeudi, d'adopter une série de mesures pour stabiliser les prix des denrées alimentaires, après de récentes fluctuations qui ont causé de l'instabilité dans plusieurs régions du monde, en particulier dans les pays pauvres.

Le ministre français de l'Agriculture, Bruno Le Maire, a déclaré que ses homologues du G20 réunis en sommet à Paris s'étaient entendus pour calmer les marchés mondiaux en mettant sur pied un système transparent pour répertorier les stocks mondiaux, en établissant des réserves alimentaires en cas d'urgence, en poussant les recherches pour découvrir de nouvelles souches de blé et en créant un mécanisme de réaction rapide pour faire face aux sécheresses dans les pays producteurs.

M. Le Maire a déclaré aux journalistes qu'il s'agissait d'un tour de force pour la communauté internationale, qui permet de croire au pouvoir de la solidarité et de l'effort commun pour s'attaquer aux grandes questions planétaires, comme l'avenir de l'agriculture.

Mais les organisations non gouvernementales qui travaillent sur les questions alimentaires ont estimé que l'accord était trop timide. Elles reprochent aux ministres du G20 de ne pas s'être attardés à la question controversée des biocarburants, dont la production monopolise des terres qui auraient pu être utilisées pour produire de la nourriture, et de ne pas avoir assez mis l'accent sur la constitution de stocks d'urgence.

Jean-Cyril Dagorn, de l'organisation Oxfam, a affirmé que fixer les prix des denrées et mettre fin aux crises alimentaires nécessitait des changements profonds. Selon lui, l'accord conclu par le G20 équivaut à mettre un pansement sur le problème.

L'accord constitue néanmoins un rare cas d'entente internationale dans le domaine de l'alimentation et de l'agriculture, les différents pays ayant longtemps été aux antipodes à cause de leurs intérêts divergents.

La gravité de la situation est apparue dans toute son ampleur quand la hausse des prix de l'énergie a causé une explosion des prix des denrées en 2008, provoquant des émeutes dans plus de 20 pays sur trois continents.

La semaine dernière, le représentant spécial de l'ONU pour la sécurité alimentaire et la nutrition, David Nabarro, a averti qu'une répétition de la crise de 2008 était très probable et que les pénuries de nourriture, d'eau potable et d'énergie allaient créer de l'anxiété sociale et de l'instabilité politique dans l'avenir.

Une récente étude des Nations unies prédit qu'au cours des prochaines décennies, le prix des céréales sera 50 pour cent plus élevé qu'au cours des 10 dernières années, tandis que la viande coûtera 30 pour cent plus cher.

Lors d'une conférence de presse en marge du sommet, le président de la Banque mondiale, Robert Zoellick, a exprimé son soutien envers les mesures adoptées et a expliqué la gravité des fluctuations des prix des denrées alimentaires.

«Nous ne pourrons pas empêcher les prix des denrées de monter et de descendre, mais nous pouvons apaiser les fluctuations et nous pouvons protéger les pauvres, qu'ils soient de petits fermiers ou des consommateurs», a dit M. Zoellick.

L'un des éléments clé du nouvel accord est le Système d'information sur les marchés agricoles, qui permettra d'éviter la spéculation de panique en rendant disponible instantanément pour tous les pays l'état des stocks alimentaires mondiaux, de la production et de la consommation, a expliqué le président de la Banque mondiale.

«Ce que nous avons vu quand les prix ont commencé à monter en 2008, c'est que le manque d'information sur les stocks et la disponibilité peut créer de la panique sur les marchés, et la panique est ce qui mène à la hausse des prix, a dit M. Zoellick. L'incertitude mène à l'instabilité.»