Les musulmanes qui portent le hijab peuvent-elles accompagner les élèves en sortie scolaire sans porter atteinte à la «neutralité» religieuse de l'école française?

La question fait débat depuis le mois de janvier, lorsqu'un groupe de parents outrés a écrit au ministre de l'Éducation pour dénoncer la décision d'un établissement primaire de Pantin, en banlieue parisienne, de refuser la participation d'une femme portant le foulard.

Le ministre, Luc Chatel, a déclaré au printemps que les personnes qui accompagnent les élèves ne peuvent porter de signes religieux ostentatoires. «Je considère que les parents d'élèves qui sont volontaires pour participer à une sortie scolaire se doivent de respecter les principes de neutralité, de laïcité de l'école de la République. Chaque fois que l'école a transgressé ces valeurs républicaines, elle n'a pas gagné.»

La Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) a mal accueilli cette déclaration: «C'est tout simplement scandaleux. Qu'on dise à une personne: «Parce que vous vous habillez de telle manière dans l'espace public, vous n'avez pas le droit d'accompagner les élèves comme n'importe quel parent d'élève», c'est une forme de discrimination.»

Dans une lettre ouverte, la directrice de l'école, Claudine Palaccio, s'est défendue en disant qu'il s'agit simplement de considérer les parents accompagnateurs comme des agents de l'État, assujettis aux règles de neutralité: «Ils ne sont pas dans le cadre privé avec leurs propres enfants, mais à l'école publique et, à ce titre, doivent se soumettre à un strict devoir de neutralité. Il n'est pas question de statut, mais de fonction. Et voilà qu'on nous rabâche à chaque fois le coup de la discrimination religieuse, du racisme et de l'islamophobie.»

Selon elle, certains établissements évitent «au maximum» de faire appel à des parents pour les sorties scolaires ou les annulent carrément de manière à éviter les complications.

Patrick Gonthier, secrétaire général de l'UNSA Éducation, l'un des principaux syndicats d'enseignants, souligne en entrevue que le nombre d'établissements où la question cause de réelles tensions reste «très minoritaire». Il n'en pense pas moins que le gouvernement aurait intérêt à clarifier la situation plutôt que de laisser les établissements «se débrouiller» comme ils l'entendent.

À son avis, les parents qui accompagnent les enfants aux sorties doivent être considérés comme des membres du service public et obéir aux mêmes impératifs de neutralité que le personnel. Il ne s'agit pas, ajoute-t-il, de stigmatiser les musulmanes, mais d'interdire de manière générale tout signe religieux ostentatoire quel qu'il soit.

Bien qu'il ait pris clairement position en ce sens, le ministre de l'Éducation n'a pas réussi à convaincre le gouvernement de trancher formellement. Selon Le Figaro, il se heurte aux objections du premier ministre François Fillon, dont l'entourage, selon le quotidien, fait valoir que «ce serait très douloureux pour les enfants de voir leur mère écartée des sorties».