Le pape Benoît XVI a demandé dimanche aux catholiques de livrer bataille «courageusement» pour défendre la famille traditionnelle, menacée de «désagrégation», lors d'une messe rassemblant -selon le Vatican - 400 000 personnes sur l'hippodrome de Zagreb.

Par un temps ensoleillé et lourd, le pape, âgé de 84 ans, est arrivé avec un peu de retard pour présider une messe qui était le point d'orgue de sa visite pastorale de deux jours en Croatie.

Cette messe avait lieu près de vingt ans après l'indépendance de la Croatie, et à l'endroit même où Jean Paul II avait célébré une messe en 1994, en pleine guerre des Balkans, lorsque le front était à 40 km.

Des fidèles, pour certains arrivés dès la nuit, ont agité des milliers de drapeaux jaunes et blancs aux couleurs du Vatican ou brandi des étendards de leurs régions quand le pape est arrivé en papamobile. Benoît XVI a été soutenu pour gravir les marches conduisant à l'autel.

Selon le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi, quatre cent mille personnes étaient rassemblées sur l'hippodrome de Zagreb.

«Malheureusement, nous devons constater, spécialement en Europe, qu'une sécularisation se développe qui entraîne (...) une désagrégation croissante de la famille», a déploré le pape allemand lors de son homélie.

«On réduit l'amour à une émotion sentimentale et à une satisfaction de pulsions instinctives, sans s'engager à construire des liens durables d'appartenance réciproque et sans ouverture à la vie: nous sommes appelés à contester une telle mentalité», a dit le pape.

Dans ce pays souvent nommé la «Pologne du sud» pour sa ferveur catholique et ses liens avec Rome, Joseph Ratzinger a exhorté les catholiques: «Chères familles, soyez courageuses! Ne cédez pas à la mentalité sécularisée qui propose la cohabitation comme préparatoire, ou même substitutive au mariage».

Benoît XVI a demandé aux familles de réclamer des États des «mesures législatives» en leur faveur, «dans la tâche d'engendrer et d'éduquer les enfants».

Il a fixé comme objectif aux familles catholiques, à l'heure où les Églises se vident et où la foi chrétienne a du mal à être transmise, d'être les relais de la «nouvelle évangélisation».

La famille doit «fournir une contribution spécifique et irremplaçable à l'évangélisation», a-t-il estimé.

«De nombreuses familles chrétiennes acquièrent toujours plus la conscience de leur vocation missionnaire et s'engagent sérieusement dans le témoignage du Christ», a-t-il relevé, rappelant que ce nouveau rôle missionnaire des familles avait été déjà voulu par Jean Paul II.

L'évêque croate Valter Zupan, président de la commission épiscopale croate de la famille, a fustigé devant la foule les législations européennes sur la bioéthique, en affirmant que «les enfants ont le droit naturel de témoigner publiquement que "un père" et "une mère" leur ont donné la vie».

À la fin de la longue célébration très recueillie, le pape a béni la foule en slovène, en serbe, en macédonien, en hongrois, en albanais et en allemand. Des catholiques étaient venus notamment de Bosnie-Herzégovine voisine.

Cette deuxième et dernière journée du 19e voyage à l'étranger de Benoît XVI dans un pays à 88% catholique devait s'achever dans l'après-midi par une prière près de la tombe du cardinal très populaire, mais controversé, Alojzije Stepinac, que Jean Paul II avait béatifié en 1998.

Cette béatification avait été contestée, certains historiens estimant qu'il avait été ambigu face au régime pro-nazi croate pendant la Seconde Guerre mondiale.

Durant les deux jours, le pape a évoqué le rôle de l'Église croate pour soutenir la nation, et souhaité que les valeurs chrétiennes soient prises en compte par l'Union européenne quand la Croatie en deviendra membre.

Benoît XVI n'a pas fait allusion jusqu'ici aux blessures subies par les Croates et les Serbes de Croatie pendant la guerre de 1991-1995.

Il doit regagner Rome en début de soirée.