Benoît XVI a invité samedi au premier jour de sa visite pastorale à Zagreb les Croates à adhérer avec «joie» à l'Union européenne et à aider les autres Européens à «revivifier» leur «inestimable patrimoine» chrétien et à résister à la «régression».

Benoît XVI effectue son premier voyage en Croatie où son prédécesseur Jean Paul II, très populaire, s'était rendu trois fois, soutenant l'indépendance croate pendant la guerre de 1991-95.

«Je pense que la majorité des Croates envisagent avec une grande joie» le moment de la prochaine adhésion à l'UE, a déclaré, optimiste, le pape dans l'avion qui le conduisait vers Zagreb.

«Depuis ses origines, votre nation appartient à l'Europe», a-t-il lancé ensuite sur le tarmac de l'aéroport, en s'adressant au président croate, Ivo Josipovic. Il a vanté «treize siècles de liens forts et spéciaux» avec le Saint-Siège.

«Puisse cette chère nation contribuer à ce que l'Union européenne valorise pleinement sa richesse culturelle et spirituelle».

«À vingt ans de la proclamation de l'indépendance et à la veille de la pleine intégration de la Croatie dans l'UE, l'histoire passée et récente de votre pays peut offrir un motif de réflexion à tous les autres peuples du continent, en aidant chacun d'eux et tout son ensemble à conserver et à revivifier l'inestimable patrimoine commun des valeurs humaines et chrétiennes», a-t-il insisté.

Lui répondant, Ivo Josipovic, social-démocrate et de son propre aveu non croyant, a rappelé la reconnaissance par le Vatian du jeune Etat croate, en janvier 1992, suivie deux jours plus tard par les pays de l'Union européenne.

Cette «autorité morale et politique du Saint-Siège et de l'Eglise catholique» a contribué à ce que «l'agression contre la Croatie soit stoppée», a-t-il dit, présentant une Croatie en phase avec l'Europe et désireuse de «réconciliation» avec ses voisins.

Dans l'avion qui l'amenait à Zagreb, Joseph Ratzinger avait dit comprendre le «scepticisme» et la «peur» de certains Croates face à la «bureaucratie» et à un «rationalisme abstrait» de l'UE, alors que le pays espère devenir membre en 2013.

Selon un sondage début mai, 44,6% des Croates sont pour l'adhésion et 41,8% contre.

Le dernier voyage à l'étranger du pape, 84 ans, remonte à novembre.

La Croatie, un pays de 4,4 millions d'habitants à 88% catholique, assimile volontiers valeurs catholiques et nationales.

Benoît XVI a aussi renouvelé ses critiques à l'encontre de la culture contemporaine et de son «individualisme favorisant une vision de la vie sans obligations et la recherche continue d'espaces privés».

L'Europe est «vouée à la régression» et «la crise de l'Occident n'a pas de remède» si l'éthique n'est pas remise au centre de l'éducation et de l'action politique, a-t-il dit au Théâtre national croate devant des personnalités de la culture.

Benoît XVI a aussi rendu hommage samedi à la figure très populaire en Croatie mais historiquement controversée du cardinal Alojzije Stepinac, qui a su, selon lui, s'élever contre «l'esprit du temps» sous le régime pro-nazi croate pendant la Seconde Guerre mondiale et sous le communisme.

Stepinac, béatifié par Jean Paul II, est vénéré en Croatie, mais certains historiens estimant qu'il avait été trop timoré, voire indulgent face au régime pro-nazi croate.

Selon le pape, ce prélat a «défendu les Juifs, les Serbes et les Tziganes» persécutés.

À plusieurs dizaines de milliers de jeunes réunis pour une veillée de prières dans une ambiance détendue sur la place Bano Josip Jelacic, dans le centre de Zagreb, le pape a demandé de savoir «aller aussi à contre-courant».

«Laissez-vous conduire vers les hauteurs de Dieu» en refusant de «mettre votre confiance entière dans l'avoir» et de «privilégier le paraître au détriment de l'intériorité», les a-t-il adjurés.