Pour les jeunes Serbes, l'arrestation de Ratko Mladic, un des principaux accusés pour les crimes de guerre commis dans l'ex-Yougoslavie, permet d'espérer l'ouverture d'un nouveau chapitre nommé Union européenne.

Depuis l'interpellation de l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie, le président serbe Boris Tadic n'a cessé de répéter que son pays «ferme un chapitre» de son histoire troublée.

Mais pour nombre de Serbes nés après les guerres des années 1990 ou enfants au moment des conflits, l'arrestation de Ratko Mladic permet de se tourner vers l'avenir.

«J'avais déjà perdu espoir que les choses changent un jour en Serbie. Tout semblait nous plonger à nouveau vers le passé», dit Milijana Jokic, une jeune ingénieure.

Milijana, 26 ans, et son compagnon, Marko Vojnovic, diplômé en ingénierie électrique, avaient commencé à rassembler les documents nécessaires pour tenter d'émigrer au Canada, déçus par le rêve toujours plus lointain d'une adhésion de la Serbie à l'Union européenne.

«Mais aujourd'hui, nous allons peut-être donner à notre pays une nouvelle chance puisqu'un obstacle majeur à l'adhésion à l'UE vient d'être levé», dit Marko, 28 ans.

La Serbie a présenté sa candidature à l'Union européenne en décembre 2009. Un an plus tard, elle a franchi un premier obstacle quand l'UE a indiqué qu'elle examinerait cette candidature, en récompense à l'attitude plus flexible de Belgrade sur la délicate question du Kosovo.

Mais, une nouvelle fois, les nuages se sont amoncelés lorsque l'UE comme le TPI ont signifié à Belgrade que le transfèrement de Ratko Mladic à la justice internationale était une exigence incontournable.

Sceptiques quant à une arrestation rapide, de nombreux jeunes Serbes se découragèrent.

Une récente étude de l'Union des étudiants de l'université de Belgrade a montré qu'un tiers des 3.000 étudiants interrogés voulait quitter le pays pour trouver de meilleures conditions de vie à l'étranger.

Nombre d'entre eux ont expliqué ce choix par la lenteur des réformes, la corruption et la crise économique dans un pays où une personne sur sept est sans emploi.

La génération «née après la décennie plombée par les guerres, a aujourd'hui les mêmes centres d'intérêt et les mêmes préoccupations que les autres Européens du même âge, mais elle est tombée dans l'apathie face à l'absence de progrès des dernières années», remarque le sociologue Vladimir Lazarevic.

«Elle voulait saisir de nouvelles opportunités, se comparer aux jeunes d'autres pays, mais tout ceci a été bousillé par l'inertie politique», ajoute-t-il.

Pourtant, aujourd'hui, l'espoir renaît:

«Si nous obtenons le statut de candidat à l'UE après l'arrestation de Mladic, j'espère que cela ouvrira des portes aux gens comme nous qui voulons élargir nos horizons», estime Ivana Rajicic, 25 ans, chimiste sans emploi.

Certains jeunes Serbes critiquent cependant l'arrestation de Ratko Mladic.

«C'est une erreur de croire que Bruxelles va nous dérouler le tapis rouge. La Serbie a répondu aux exigences de l'Occident et de plus en plus de demandes vont suivre», regrette Ranko, un étudiant en histoire de 22 ans qui refuse de donner son nom de famille.

«La Serbie devrait avoir honte de vendre ses citoyens pour obtenir des miettes d'Europe (...)», ajoute-t-il.

Ana, vétérinaire de 22 ans, ne partage pas ce pessimisme : «Je suis née pendant la guerre en Bosnie (1992-95) et depuis des années on n'a parlé que de Mladic et de comment sa cavale bloquait l'entrée de la Serbie dans l'UE. Voyons maintenant comment les choses changent ici et en Occident».