Le président du Pakistan, Asif Ali Zardari, est arrivé mercredi à Moscou, son déplacement à l'étranger le plus important depuis la mort d'Oussama Ben Laden au cours d'une opération américaine en territoire pakistanais, qui a placé les autorités de ce pays dans la tourmente.

Il doit être reçu jeudi au Kremlin par le président Dmitri Medvedev pour signer une série d'accords dans les domaines de l'agriculture, l'aviation et l'énergie.

«L'économie sera au coeur de la visite», a indiqué à l'AFP un porte-parole de l'ambassade pakistanaise à Moscou, Raja Abdul Qayyum.

Mais il s'agit aussi de la première visite de premier plan à l'étranger du dirigeant pakistanais depuis la mort de Ben Laden, qui a placé les autorités dans une position délicate aussi bien sur la scène internationale que dans leur pays.

Les Éats-Unis ont laissé entendre qu'ils soupçonnaient des responsables pakistanais d'avoir protégé le chef d'Al-Qaïda. M. Zardari est aussi critiqué dans son pays sur le fait qu'un commando américain ait pu pénétrer sans obstacle au Pakistan, sans même en informer Islamabad.

Le chef de l'Etat pakistanais s'est rendu au Koweit durant le week-end, tandis que son Premier ministre Yousuf Raza Gilani doit se rendre en Chine, mais aucune visite dans les grandes capitales occidentales n'est prévue pour le moment.

La Russie avait salué «le succès important obtenu par les Etats-Unis» en tuant Oussama Ben Laden.

Un message répété par Dmitri Medvedev mercredi, qui a estimé que la mort de Ben Laden avait «un impact direct» pour la sécurité de la Russie, Moscou luttant depuis des années contre une insurrection islamiste dans le Caucase russe.

«La liquidation de terroristes, comme cela a été récemment le cas pour Ben Laden, a un impact direct sur le niveau de sécurité (...) de notre pays», a-t-il relevé.

«Ce n'est pas un secret que le réseau terroriste Al-Qaïda a envoyé et continue d'envoyer régulièrement ses émissaires dans notre Etat», a encore souligné M. Medvedev.

Le chef de la diplomatie russe Sergueï lavrov a, lui, souligné que l'opération américaine au Pakistan était légale.

«Ceux qui ont mis en oeuvre l'opération (pour éliminer Ben Laden) avaient une base légale» en leur faveur, a-t-il dit, en référence à une résolution de l'ONU adoptée après les attentats du 11 septembre 2001.

Par ailleurs, M. Zardari espère obtenir lors de sa visite de trois jours en Russie un soutien économique de Moscou, son pays étant dans une situation précaire en la matière.

Selon le quotidien russe Vedomosti, le Pakistan négocie notamment un crédit de 540 millions de dollars pour la rénovation de l'aciérie Paksteel, construite par l'URSS, afin de porter sa production annuelle de 300.000 à un million de tonnes.

Le président pakistanais a indiqué dans un entretien à l'agence d'Etat russe Itar-Tass que sa visite à Moscou devait permettre de relancer les relations bilatérales.

«J'espère que durant cette visite les relations entre nos deux pays vont bénéficier d'une nouvelle impulsion», a-t-il déclaré.

«La Russie tsariste rêvait d'accéder aux mers du Sud», a-t-il relevé, «le Pakistan invite la Russie contemporaine à accéder à ces mers du sud ce qui va sans aucun doute faciliter la prospérité des deux pays».

Selon le Kremlin, Moscou est intéressé par le secteur énergétique du Pakistan, notamment le projet de gazoduc TAPI (Turkménistan-Afghanistan-Pakistan-Inde) qui fait l'objet de négociations depuis des années entre ces quatre pays.

M. Zardari doit par ailleurs se rendre à Skolkovo, un centre pour les technologies de pointe lancé par Dmitri Medvedev et présenté comme la future Silicon Valley de la Russie. Il est aussi attendu à Saint-Pétersbourg (nord-ouest), deuxième ville du pays.