Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a une nouvelle fois lundi attaqué la magistrature, en marge d'un de ses procès, la qualifiant de «cancer de la démocratie» en pleine journée d'hommage aux victimes du terrorisme, suscitant l'indignation notamment de magistrats.

Les juges «sont le cancer de notre démocratie», a déclaré M. Berlusconi en se disant victime d'une persécution du parquet de Milan, en marge d'une audience du procès Mills où il est accusé de corruption de témoin.

Il a fustigé les «accusations infondées des procureurs de Milan qui utilisent le droit contre ceux qu'ils considèrent comme un adversaire politique».

Le président de l'Association nationale des magistrats Luca Palamara a qualifié ces propos de «graves et inacceptables».

Parler de «cancer ou de métastases» pour stigmatiser les juges est de «la vulgarité de bas étage», a dénoncé à son tour Francesco Saverio Borelli, ex-procureur en chef de Milan, tandis que Rosy Bindi, dirigeante de l'opposition de gauche, a parlé d'une «véritable pathologie personnelle» de Berlusconi.

Quant au procès Mills, auquel il assistait pour la première fois, M. Berlusconi l'a qualifié de «paradoxal, vraiment surréaliste», affirmant que le dossier ne contenait «rien de rien» et jurant ne pas connaître l'avocat Mills, auquel il est accusé d'avoir versé 600 000 dollars pour de faux témoignages.

De son côté, M. Mills a déjà été condamné pour ces faits avant de bénéficier de la prescription.

La prochaine audience a été fixée au 16 mai en présence de deux témoins, dont l'ex-patron de l'écurie de Formule 1 de Renault, Flavio Briatore.

Avant l'audience, des frictions ont opposé une vingtaine de partisans de M. Berlusconi et une poignée de défenseurs de la magistrature. Ceux-ci ont déposé pancartes et bouquets en hommage aux 26 magistrats morts pendant les années de plomb du terrorisme des décennies 1970-80 ou tués dans des attentats de la mafia au début des années 1990.

Des photos géantes de deux juges et d'un avocat, victimes du terrorisme, ont été placardées sur la façade du tribunal. Une grande banderole disait «Merci aux magistrats et à la police judiciaire».

C'était la quatrième fois que M. Berlusconi se rendait au tribunal de Milan depuis son retour le 28 mars pour une autre affaire, après huit ans d'absence.

Au même moment, le président Giorgio Napolitano commémorait avec émotion la mort de dix magistrats pendant les années de plomb, à l'occasion de la Journée en mémoire des victimes du terrorisme.

M. Berlusconi, qui revendique haut et fort son anti-communisme, a qualifié de «figures héroïques» les juges tués par les Brigades rouges d'extrême gauche.

Puis dans un communiqué, il a rendu hommage «aux 400 morts et 1200 blessés victimes du terrorisme de matrice communiste ou néofasciste», citant «magistrats, journalistes, policiers, carabiniers, professeurs universitaires, leaders politiques et fonctionnaires».

Lundi dernier, le Cavaliere, 74 ans, était déjà venu à Milan pour une audience préliminaire à un éventuel procès dans l'affaire Mediatrade (surfacturation de droits télévisés). Outre l'affaire Mills, il fait l'objet de deux autres procès (Mediaset, Rubygate).

Le procès du «Rubygate», le plus difficile car M. Berlusconi est accusé de recours à la prostitution de mineure et d'abus de pouvoir, a démarré le 6 avril et doit reprendre le mardi 31 mai. M. Berlusconi qui conteste la compétence du tribunal ne s'est pas présenté à l'audience du 6 avril.

Aussi bien le Cavaliere que la victime présumée, la Marocaine Karima El Mahroug nient en bloc la thèse de l'accusation selon laquelle M. Berlusconi a payé pour des rapports sexuels avec la jeune fille quand elle était mineure, un délit en Italie.