Les policiers des compagnies républicaines de sécurité plus connus en France sous le nom de CRS sont furieux d'une nouvelle directive qui leur interdit de consommer de l'alcool au cours des repas pris en service.

«On veut faire de nous des curés, mais sans le vin de messe», dénonce Didier Mangione, secrétaire national du syndicat Unité SGP-Police, qui a écrit récemment à la haute direction pour se plaindre de ce changement de cap.

La circulaire précédente, adoptée il y a une vingtaine d'années, prévoyait que la consommation de boissons fermentées non distillées, comme le vin, la bière ou le cidre, n'était « autorisée qu'en accompagnement des repas » et hors de la vue du public.

Les CRS, qui patientent souvent de longues heures dans des cars de transport à l'occasion d'événements publics à encadrer, disposaient de repas préparés comprenant une bière ou encore un quart de vin.

La diffusion par certains médias de photos montrant des CRS en train de boire des bières en marge d'une manifestation contre les retraites en octobre aurait cependant heurté la direction du corps de police, qui a décidé de mettre le holà à toute consommation d'alcool.

Selon l'Unité SGP-Police, qui demande un assouplissement de la nouvelle directive, les photos en question ont plus heurté «la direction que l'opinion publique» et ne justifient pas un changement tous azimuts de pratiques bien établies.

Public partagé

Le public français semble plus partagé sur la question. Alors que certains voient dans cette interdiction le symbole d'une société de plus en plus hygiéniste, d'autres la jugent tout à fait naturelle.

«Il me semble que cela relève du bon sens de base : les personnes qui doivent assurer l'ordre et qui disposent d'armes doivent être soumises à la tolérance zéro. Ces mêmes personnes accepteraient-elles que le chirurgien qui va leur faire un pontage le fasse après un quart de rouge?», demande un internaute, Florian, sur le site d'un quotidien gratuit.

Le flot de critiques et de commentaires sarcastiques entendus au cours des derniers jours n'a pas refroidi la détermination du syndicat Unité SGP-Police, qui doit rencontrer la haute direction la semaine prochaine pour faire entendre ses doléances.

Yannick Danio, délégué général du syndicat, indique en entrevue qu'il n'y a pas de raison que les CRS ne puissent continuer à prendre un verre de vin rouge durant leurs repas en service, pourvu que «tout se passe hors de vue du public».

«Sinon, ça voudrait dire que toutes les personnes qui prennent un verre de vin sont ivres à la sortie et ne peuvent pas travailler. Il faudrait à ce moment-là interdire le verre de vin à tout le monde», dit-il.

L'exaspération du syndicat sur cette question somme toute secondaire reflète sa préoccupation face à la «détérioration générale» des conditions de travail des CRS, qui ont exercé d'importants moyens de pression en début d'année pour empêcher la fermeture de compagnies à Marseille et Lyon.

«Cette histoire de vin, c'est la goutte qui a fait déborder le vase», relève M. Danio.