Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, décrié pour l'adoption de lois lui permettant d'échapper à ses ennuis judiciaires, s'est présenté pour la première fois depuis huit ans devant un tribunal, lundi à Milan pour une audience sans grand enjeu.

Après cette audience dite «préliminaire» qui sera suivie d'une autre lundi, il a quitté en voiture le palais de justice avec son escorte. Mais il s'en est extrait en apercevant une centaine de partisans qui le saluaient aux cris de «Silvio, Silvio» et «hip hip hourra».

«Tout s'est bien passé, je me prépare pour le 4 avril, j'irai à la prochaine audience», leur a-t-il lancé, perché sur le marche-pied de sa voiture.

En revanche, à propos du procès Rubygate où il affronte des accusations graves de sollicitation de prostituée mineure et abus de pouvoir qui doit débuter le 6 avril, il a seulement lâché une phrase: «c'est un autre procès».

L'audience de lundi était la première d'une série organisées pour décider si M. Berlusconi doit être jugé pour fraude fiscale et abus de confiance concernant la surfacturation présumée de droits télévisés achetés par Mediatrade-RTI, une société de son empire, à des majors américaines.

Selon des participants, M. Berlusconi n'a fait aucune déclaration devant le juge des audiences préliminaires, mais a serré la main des deux procureurs dont l'un, Fabio De Pasquale, qu'il avait publiquement étrillé.

Ses sympathisants s'étaient regroupés devant le tribunal derrière des banderoles clamant: «la politique dans les urnes, pas dans les tribunaux» ou «Silvio tu dois résister, résister, résister».

«Nous sommes venus soutenir notre président du Conseil contre les attaques judiciaires d'une partie politisée de la magistrature», a indiqué à l'AFP Giovanni Esposito, 46 ans, commerçant et militant du Peuple de la Liberté.

Des militants d'opposition, issus surtout du parti Italie des valeurs (IDV) dirigé par la bête noire de M. Berlusconi, l'ex-juge anticorruption Antonio Di Pietro leur faisaient face. Luca Ragone, un étudiant de 28 ans, élu IDV à Milan, a douté de la volonté de M. Berlusconi de se rendre à toutes les audiences judiciaires le concernant.

Selon lui, M. Berlusconi risque de venir aux audiences préliminaires «car ce n'est pas un procès» et pourrait ignorer les convocations pour le Rubygate ou les affaires Mills (corruption de témoins) et Mediaset (fraude fiscale), où «il est vraiment jugé».

La dernière fois que Berlusconi s'était présenté devant la justice remontait à juin 2003 dans une affaire l'opposant à l'industriel Carlo De Benedetti et pour laquelle il fut acquitté quatre ans plus tard.

Avant d'aller au tribunal, le chef du gouvernement a dénoncé sur Canale 5, une chaîne privée lui appartenant, des «accusations ridicules et infondées» dans l'affaire Mediatrade.

Il s'en est pris aussi à la gauche, en affirmant qu'en «Italie, le communisme n'a jamais changé: il y a encore des gens qui utilisent le code pénal comme instrument de lutte idéologique».

Les poursuites et procès contre M. Berlusconi étaient suspendus ces trois dernières années à la faveur de plusieurs lois adoptées par son gouvernement.

Elles ont repris avec la levée partielle de son immunité judiciaire à la mi-janvier.

M. Berlusconi a été condamné dans le passé à un total de 6 ans et 5 mois de prison ferme pour corruption, faux en bilan et financement illicite d'un parti politique, mais a ensuite été acquitté ou bénéficié de prescriptions.