Le leader du Fine Gael (centre), Enda Kenny, vainqueur des élections législatives du 25 février, a été investi mercredi Premier ministre d'Irlande, à la tête d'un gouvernement de coalition qui aura la tâche dantesque d'assurer le redressement d'un pays ruiné par la crise.

«Je suis tout à fait conscient de la tâche qui m'attend», a déclaré l'ancien instituteur de 59 ans, peu après avoir été élu à une écrasante majorité par le Dail, chambre basse du Parlement, qui se réunissait pour la première fois depuis les législatives.

L'île vit «ses jours les plus difficiles, en matière économique, depuis son indépendance» en 1922, a reconnu M. Kenny. «C'est un jour éclatant qui s'annonce. Ensemble, croyons en notre avenir, redressons la tête», a-t-il lancé aux députés, peu avant d'être officiellement investi par la présidente Mary McAleese.

L'Irlande, jadis qualifiée de «Tigre celtique» pour sa croissance formidable, sort à peine d'une très sévère récession, qui a fait exploser le chômage, à près de 14%, et les déficits publics (32% du Produit intérieur brut en 2010).

Le gouvernement sortant avait ainsi été contraint d'accepter un plan de sauvetage international, signé en novembre avec l'Union européenne (UE) et le Fonds monétaire international (FMI).

Mais le programme d'aide, d'un montant de 85 milliards d'euros, a été ressenti comme une humiliation et une perte de souveraineté par des Irlandais qui ont chèrement acquis leur indépendance.

La première tâche du nouveau gouvernement sera ainsi de renégocier les conditions du plan, largement jugées iniques sur l'île. Lors de la campagne, Enda Kenny et le leader du Labour, Eamon Gilmore, qui devrait devenir vice-Premier ministre du nouveau gouvernement, avaient notamment promis d'exiger une révision à la baisse du taux d'intérêt auquel l'UE prête à l'Irlande et qu'ils jugent «punitif».

Enda Kenny ira porter ses récriminations à Bruxelles dès jeudi soir, où il rencontrera le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, à la veille d'un sommet de la zone euro consacré au plan d'action visant à éviter de nouvelles crises de la dette.

Le vif ressentiment provoqué par le plan de sauvetage, ainsi que par la crise, s'est traduit par un cuisant revers pour le Fianna Fail, parti du Premier ministre sortant Brian Cowen, sans toutefois conférer la majorité absolue au Fine Gael. La formation a donc été contrainte de s'allier au Labour, qui a presque doublé sa représentation parlementaire le 25 février.

«Nous allons entamer la renégociation du plan UE-FMI, un accord qui est mauvais pour l'Irlande et mauvais pour l'Europe», a répété Enda Kenny devant le Dail, en annonçant la formation de son nouveau gouvernement.

Le Labour y occupe cinq des quinze ministres, son leader Eamon Gilmore devenant vice-Premier ministre ainsi que ministre des Affaires étrangères et du Commerce.

Le très influent poste des Finances revient à l'ancien chef de file du Fine Gael, Michael Noonan, mais un nouveau ministère a été créé, celui des Dépenses publiques et de la Réforme. Ce portefeuille, confié au travailliste Brendan Howlin, avait été exigé par le Labour qui entend ainsi avoir la main sur le très sévère programme d'austérité, mis en place par le gouvernement sortant, et que le Labour avait vivement combattu lors de la campagne.