Après les révélations selon lesquelles ses ministres ont passé les dernières vacances de Noël en Tunisie et en Égypte, le président français Nicolas Sarkozy a annoncé hier soir avoir rappelé à l'ordre son cabinet. Désormais, ses ministres devront «privilégier» la France pour leurs vacances et obtenir une autorisation au plus haut niveau pour tout séjour à l'étranger.

Le président Nicolas Sarkozy a cherché hier à désamorcer un scandale sur les vacances de ministres en Égypte et en Tunisie et une crise avec les juges, des dossiers qui, à un peu plus d'un an de la prochaine présidentielle, plombent son action.

Handicapé par une cote de popularité désastreuse, le chef de l'État a répondu hier pendant une heure et demie aux questions de neuf Français sélectionnés par la chaîne privée TF1.

«La politique étrangère de la France n'a été impactée ni par le déplacement en Tunisie, ni par le déplacement en Égypte», a-t-il déclaré au sujet des vacances de son premier ministre, François Fillon, à l'invitation d'Hosni Moubarak et de celles de la chef de la diplomatie, Michèle Alliot-Marie, en Tunisie.

«Sans doute, si nous en avions parlé, Michèle Alliot-Marie et moi, nous aurions convenu que ce n'était pas la meilleure idée que d'aller en Tunisie, même si c'est plus facile à dire après qu'avant», a reconnu Nicolas Sarkozy.

La ministre est critiquée avec virulence pour avoir utilisé le jet privé d'un riche homme d'affaires lié à l'ex-président Zine el-Abidine Ben Ali pendant ses vacances dans ce pays alors en pleine révolte.

François Fillon se voit fragilisé après la révélation de ses vacances de fin d'année en Égypte aux frais du président Hosni Moubarak, lui aussi aux prises avec une contestation populaire sans précédent.

Ces polémiques tombent particulièrement mal pour Nicolas Sarkozy qui, dans sa campagne en 2007, avait promis une «République irréprochable».

Vacances à Marrakech

Mercredi, il a demandé à ses ministres de «privilégier» la France à l'avenir pour leurs vacances et les a prévenus qu'ils devraient obtenir une autorisation spéciale au plus haut niveau pour tout séjour à l'étranger. «Je comprends que cela puisse choquer, et donc cela doit cesser», a-t-il insisté hier.

À titre personnel, le président, qui a lui-même passé des vacances de fin d'année au Maroc dans une résidence de la famille royale à Marrakech, est pour l'instant épargné par ces controverses. Il n'a pas été interrogé hier sur ses vacances au Maroc.

Depuis une dizaine de jours, l'opposition n'en finit plus de dénoncer «la confusion des genres», le «délitement de l'esprit public» ou encore l'«indécence» du pouvoir actuel.

Le centriste François Bayrou a appelé hier Nicolas Sarkozy à «dire la vérité» aux Français, qui «ont l'impression qu'il y a un monde pour les dirigeants et un monde pour les citoyens».

La socialiste Ségolène Royal a accusé le président d'avoir «érigé le mensonge et les effets d'annonce en méthode de gouvernement».

Juges

Pour corser le tout, Nicolas Sarkozy, qui stagne à 34% d'opinions favorables selon un récent sondage, fait face à une révolte sans précédent des juges, ulcérés par ses propos les mettant en cause dans une affaire retentissante de meurtre. Hier, des manifestations ont eu lieu dans des dizaines de villes en France, en point d'orgue d'une mobilisation entamée il y a une semaine.

Nicolas Sarkozy, qui reproche régulièrement aux juges leur manque de sévérité à l'occasion de faits divers médiatiques, avait mis le feu aux poudres le 3 février: il avait dénoncé des «dysfonctionnements graves» des services de police et de justice dans le suivi du meurtrier présumé d'une jeune fille de 18 ans, un délinquant récidiviste.

Le multiculturalisme est un «échec» en Europe comme en France, a déclaré hier le président Sarkozy. «On s'est trop préoccupé de l'identité de celui qui arrivait et pas assez de l'identité du pays qui accueillait.» Le chef de l'État français a ainsi emboîté le pas à la chancelière allemande, Angela Merkel, et au premier ministre britannique, David Cameron, qui ont tous deux déclaré la même chose dans les dernières semaines. «Nous ne voulons pas d'une société dans laquelle les communautés coexistent les unes à côtés des autres. Si on vient en France, on accepte de se fondre dans une seule communauté, la communauté nationale. Si on n'accepte pas cela, on ne vient pas en France», a-t-il insisté. - AFP