La piste d'un Russe converti à l'islam wahhabite se précisait vendredi quatre jours après l'attentat qui a fait 35 morts à l'aéroport de Moscou, selon les informations de la presse locale, alors que les enquêteurs restaient très discrets sur l'avancée de leurs investigations.

Le quotidien Kommersant a précisé vendredi ses révélations de la veille qui désignaient un militant islamiste russe comme le principal suspect de l'attaque suicide de l'aéroport Domodedovo.

L'individu, Vitali Razdoboudko, 32 ans, était connu de la police depuis sa conversion à l'islam lorsqu'il était étudiant à Piatigorsk, dans la région de Stavropol, au pied du massif du Caucase.

Selon un responsable des forces de l'ordre locales, M. Razdoboudko était déjà recherché dans le cadre d'une enquête sur un autre attentat, la police le soupçonnant d'appartenir à un groupe rebelle, le «nogaïsski djamaat». Il aurait disparu en novembre avec sa concubine et leur nouveau-né.

Selon Kommersant, la police étudie de près la relation du couple avec leurs colocataires: Anvarbek Amangaziev, interpellé en octobre dans le cadre d'une enquête sur une série d'attentats, et sa compagne Zeïpan Souiounova.

Cette dernière a été interpellée en janvier après l'explosion accidentelle d'une ceinture d'explosif à Moscou, qui avait tué une autre femme s'apprêtant, selon plusieurs médias, à commettre un attentat suicide le 31 décembre.

Kommersant laisse entendre que cette femme pourrait être la compagne de Razdoboudko, et que celui-ci aurait pu perdre la vie à son tour en commettant l'attentat de Domodedovo.

Autre révélation, selon Kommersant : Razdoboudko a été converti à l'islam par un imam russe, Anton Stepanenko, un islamiste wahhabite présumé dont les disciples ont participé à une attaque rebelle contre Naltchik (Kabardino-Balkarie, Caucase) en octobre 2005 (des dizaines de morts).

Selon Kommersant, la police a aussi saisi des livres, des DVD à caractère extrémiste et un guide de fabrication d'engins explosifs, lors d'une perquisition à son domicile en 2006.

«Les gens sont désenchantés par le pouvoir en place (en Russie), les pratiques, l'engagement politique des hiérarques de l'Église orthodoxe», explique à l'AFP Sergueï Aroutiounov, expert sur le Caucase à l'Académie russe des sciences, expliquant la propagation de l'islam radical parmi les non-musulmans.

«Le sentiment de frustration iéologique monte, les gens psychologiquement instables cherchent une nouvelle foi, de nouvelles idoles», explique-t-il.

Pour un expert militaire indépendant, Alexandre Golts, «le problème n'est pas que des Slaves apparaissent parmi les wahhabites, il est bien plus grave: une génération entière a grandi pendant la guerre (dans le Caucase) et s'est constituée dans cette idéologie».

Jusqu'à présent, les enquêteurs n'ont donné aucune information officielle sur les pistes étudiées en lien avec l'attentat de Domodedovo.

Après la première guerre de Tchétchénie (1994-1996) entre forces russes et indépendantistes, la rébellion s'est progressivement islamisée et a de plus en plus débordé les frontières tchétchènes pour se transformer au milieu des années 2000 en un mouvement armé actif dans tout le Caucase du Nord.

Les autorités russes ne parviennent pas à juguler ces violences, qui présentent un grave risque pour la sécurité des Jeux olympiques d'hiver de 2014 à Sotchi, à seulement quelques centaines de kilomètres des zones instables.