Les deux chambres du Parlement du Kazakhstan se sont prononcées vendredi en faveur de la tenue d'un référendum devant permettre de prolonger sans élection jusqu'en 2020 le mandat du président Noursoultan Nazarbaïev, au pouvoir depuis l'époque soviétique.

Les parlementaires de cette ancienne république soviétique, la plus riche d'Asie centrale, ont adopté à l'unanimité en première et en deuxième lecture des amendements à la Constitution permettant ce référendum. Nour Otan, le parti du président Nazarbaïev contrôle tous les sièges du Parlement sans exception.

Le plébiscite devrait être organisé au printemps, «sans doute au mois de mars», selon le sénateur Gani Kassymov.

Un autre amendement inscrit également dans la Constitution le titre de Chef de la Nation accordé en 2010 au président Nazarbaïev, 70 ans, qui lui confère notamment des pouvoirs et une immunité perpétuels.

Un groupe d'initiative a remis cette semaine à la commission électorale plus de cinq millions de signatures de citoyens (55% des électeurs) favorables à la tenue d'un tel plébiscite, qui annule au passage deux présidentielles prévues (2012 et 2017).

«Pour les Kazakhs, comme pour le reste du monde, les mots "Nazarbaïev" et "Kazakhstan" sont depuis longtemps synonymes», a affirmé après le vote le député Erlan Nigmatouline

«Nazarbaïev c'est le Kazakhstan, et le Kazakhstan c'est avant tout notre président», a-t-il poursuivi.

En décembre dernier, les assemblées avaient déjà approuvé à l'unanimité la tenue du référendum, mais le président s'était, officiellement, opposé à cette initiative.

Dans ce pays où rien ne se fait sans l'approbation du chef de l'État, les principaux acteurs se sont tous prononcés pour la consultation populaire, et le Parlement a pu bloquer le veto présidentiel en votant une seconde fois la tenue du référendum.

L'opposition kazakhe, qui est totalement marginalisée, s'est emportée contre cette décision, dénonçant la dérive autoritaire de plus en plus marquée de M. Nazarbaïev, qui aura 80 ans en 2020.

«C'est la poursuite du chemin vers le néant. C'est une impasse dans laquelle tout le pays se retrouve otage des sympathies et des antipathies d'un seul citoyen: Nazarbaïev», a insisté Amirjan Kossanov, secrétaire général du parti OSDP-Azat.

M. Nazarbaïev avait été réélu à la dernière présidentielle en 2005 avec plus de 90% des suffrages. Jamais une élection kazakhe n'a été reconnue comme libre par l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe depuis l'indépendance du pays en 1991, à la chute de l'URSS.

Les États-Unis ont dénoncé en décembre le projet de référendum, y voyant une nouvelle entorse aux règles démocratiques dans ce pays.

L'Occident évite généralement de critiquer le Kazakhstan afin de maintenir ses bonnes relations avec cette puissance pétrolière stratégique, grande comme cinq fois la France et encadrée par la Russie et la Chine.

Le Kazakhstan avait ainsi obtenu la présidence 2010 de l'OSCE, qui doit notamment s'assurer du respect des principes démocratiques chez ses 56 membres.

L'opposition dénonce régulièrement les attaques dont elle est victime. L'un de ses leaders, Altynbek Sarsenbaïouly, a été assassiné en 2006. Les meurtriers ont été condamnés, mais les proches de la victime estiment que le véritable commanditaire court toujours.

Quelques semaines auparavant, un autre opposant, Zamanbek Nourkadilov, avait été retrouvé mort chez lui, tué de deux balles dans la poitrine et d'une autre dans la tête. L'enquête avait conclu à un suicide.