L'interminable crise politique belge, qui en était à son 207e jour jeudi, a connu une nouvelle aggravation avec la démission du sénateur belge Johan Vande Lanotte, chargé d'une mission de conciliation entre néerlandophones et francophones.

«Il n'y a pas de volonté suffisante d'entamer les négociations», a-t-il expliqué à la presse après avoir demandé au roi Albert II d'être déchargé de la mission qu'il lui avait confiée le 21 octobre.

M. Vande Lanotte a donc jeté l'éponge, renonçant à débloquer les tractations sur la sixième réforme des institutions du pays en 40 ans.

Le monarque a cependant réservé sa réponse. Les deux hommes doivent se revoir lundi.

La Belgique a été dans l'incapacité de se doter d'un nouveau gouvernement depuis les législatives du 13 juin en raison d'un désaccord de fond entre néerlandophones et francophones, la Flandre réclamant davantage d'autonomie.

Mercredi, le parti indépendantiste sorti vainqueur en Flandre du scrutin l'an dernier, la Nouvelle Alliance flamande (N-VA), a rejeté en l'état la note de synthèse rédigée par M. Vande Lanotte, ébauche de compromis qui devait permettre la reprise des négociations entre les sept formations concernées.

La N-VA a exigé des réponses aux «remarques fondamentales» qu'elle faisait sur ce texte de 60 pages avant d'accepter de s'asseoir à nouveau à la table des négociations avec les six autres partis, dont trois francophones.

La N-VA n'a pas rendu publiques ses objections, mais en avait informé directement M. Vande Lanotte.

Un autre parti flamand, le CDV chrétien-démocrate, avait exprimé également des réserves, demandant des rectifications préalables sur des points «essentiels» comme le statut de Bruxelles.

Les cinq autres partis - PS, Ecolo et centristes du CDH côté francophone, Goen (Verts) et SPA socialiste côté néerlandophone -, s'étaient en revanche dits prêts à une reprise des pourparlers même si certains exigeaient des «précisions» ou des «amendements».

Jusqu'à sa nouvelle audience lundi, M. Vande Lanotte a indiqué qu'il ne s'exprimerait plus en public.

Parmi les responsables politiques, le chef du principal parti francophone, le PS, Elio Di Rupo, a dénoncé «une situation insupportable», et un «spectacle (...) à la fois indigne et irresponsable».

M. Di Rupo s'est dit pour la première fois «prêt s'il le faut à ouvrir les négociations institutionnelles à d'autres partenaires» autrement dit aux libéraux francophones et flamands du MR et du VLD jusque là exclus des discussions.

«La famille libérale peut se joindre aux négociations, la situation est suffisamment grave», a-t-il estimé.

Mais, a-t-il prévenu, «il faudra y aller avec la volonté d'un compromis c'est-à-dire la volonté d'une solution équilibrée».

La N-VA, jugeant ses interlocuteurs trop à gauche, n'avait pas caché dès l'été dernier son souhait de voir le MR entrer dans la danse, mais sans succès.

Le leader du MR, Didier Reynders, a redit jeudi soir que son parti était pour un changement de méthode, estimant qu'il fallait plutôt débattre avec les partis flamands de ce que les deux communautés veulent encore bâtir ensemble.

Comme l'a noté un politologue anversois, Dave Sinardet, l'accord ébauché dans le document Vande Lanotte sur la question la plus passionnelle, celle des droits de la minorité francophone de la périphérie de Bruxelles, était le plus favorable qu'aient arraché les Flamands (60% des 10,5 millions de Belges) en 30 ans de tractations.

Ces droits électoraux et judiciaires seraient éteints, sauf dans six communes de la banlieue bruxelloise, situées en Flandre.

Or l'une des factions constituantes du MR est le FDF, le groupe francophone le plus militant, arc-bouté contre les revendications flamandes dans la banlieue de Bruxelles dont il exige l'élargissement.