Le système bancaire français va-t-il imploser, aujourd'hui, à la suite de l'appel «révolutionnaire» de l'ex-vedette de soccer Éric Cantona, qui demande à la population de retirer massivement son argent des banques du pays?

Bien que le risque paraisse pour le moins limité, la question fait couler beaucoup d'encre dans l'Hexagone.

«Cantona va-t-il faire sauter la banque?» demandait encore hier le quotidien économique La Tribune, sceptique. Il y a tout de même un écart entre la rumeur et le passage à l'acte, dit le journal.

La polémique a débuté en octobre, lorsque Cantona, reconverti en acteur populaire, s'en est pris aux banques dans une entrevue au quotidien nantais Presse Océan.

«Le système est bâti sur le pouvoir des banques. Donc, il peut être détruit par les banques. Au lieu qu'il y ait 3 millions de gens (dans la rue), ces 3 millions de gens vont à la banque et retirent leur argent et les banques s'écroulent (...) Là, il y a une vraie menace, là il y a une vraie révolution», avait déclaré Éric Cantona.

Un cinéaste français et une scénariste belge reprennent l'idée dans le site bankrun2010.com, qui appelle les citoyens à retirer leur argent le 7 décembre pour favoriser l'émergence de «banques qui soutiennent les projets qui profitent aux citoyens plutôt qu'aux marchés financiers».

Parallèlement, un groupe Facebook créé en soutien à la «révolution» du 7 décembre la présente comme une manière de se «faire entendre auprès des élites dirigeantes du pays». En date d'hier, près de 38 000 personnes y avaient confirmé leur volonté de vider leur compte.

«Grotesque et irresponsable»

Le gouvernement est intervenu à quelques reprises au cours des derniers jours pour critiquer l'appel du sportif. La ministre des Finances, Christine Lagarde, a indiqué la semaine dernière que

M. Cantona ferait mieux de s'en tenir à son domaine de compétences, le soccer.

Plus agressif, le ministre du Budget, François Baroin, a condamné samedi l'appel «grotesque et irresponsable» d'Éric Cantona et mis en garde les contribuables contre les risques d'une telle initiative.

Les banques, après avoir ri de l'idée, ont adopté un ton nettement plus alarmiste à l'approche du 7 décembre. «Retirer son argent des banques est extrêmement dangereux à la fois pour soi (...) et ce serait aussi dramatique pour l'ensemble du système», a déclaré le directeur général délégué de la Société générale, Jean-François Sammarcelli.

L'organisation Attac, qui lutte pour une réforme du secteur financier, salue le mouvement et appelle de ses voeux la multiplication d'initiatives citoyennes en vue de «mettre au pas les banques prédatrices».

Bien que quelques analystes financiers s'inquiètent, ils relèvent pour la plupart que le mouvement demeure trop marginal pour être une menace véritable.

Loin d'être rassurés, deux syndicats du secteur bancaire ont demandé hier à Éric Cantona de repenser son appel, de crainte que des «milliers d'emplois» soient «mis en danger».

Cantona, pour sa part, persiste et signe. Dans une dépêche parue la semaine dernière, il a confirmé qu'il entendait se rendre aujourd'hui à sa banque pour retirer son argent.