Face à Nicolas Sarkozy, la socialiste française Martine Aubry a promis jeudi un pacte pour la présidentielle de 2012 entre les ténors de son parti, dont le patron du FMI Dominique Strauss-Kahn, au risque de vider de sa substance le projet de primaires à «l'américaine».

«Nous proposerons une candidature véritablement ensemble, c'est-à-dire pas l'un contre l'autre ou l'une contre l'autre», a-t-elle affirmé dans plusieurs médias. Outre elle-même et Dominique Strauss-Kahn, l'entente inclut Ségolène Royal, candidate malheureuse en 2007 et toujours opposante pugnace à Nicolas Sarkozy.

Martine Aubry cherche avant tout à éviter les divisions et les déchirements sur la question du candidat, alors qu'à droite le président français vient de remanier son gouvernement dans le but de préparer l'échéance du printemps 2012.

Les socialistes sont suspendus à la décision du patron du Fonds monétaire international (FMI). Auréolé du prestige d'une institution au coeur de la gestion de la crise financière, Dominique Strauss-Kahn, qui s'en tient à son devoir de réserve, refuse de dévoiler d'éventuelles ambitions nationales.

De passage à Paris à la mi-novembre, il s'est dit «touché» par les sondages qui lui prédisent une victoire écrasante.

Si un second tour d'élection se disputait maintenant, il obtiendrait jusqu'à 62% des voix contre 38% à Nicolas Sarkozy, selon plusieurs enquêtes publiées ces derniers jours. Pour Martine Aubry et Ségolène Royal, la partie serait très serrée.

L'ancien ministre des Finances de 61 ans souffle le chaud et le froid et joue avec les nerfs de ses camarades du parti socialiste (PS).

La presse spéculait jeudi sur le sens d'une interview accordée à l'hebdomadaire allemand Stern dans laquelle M. Strauss-Kahn déclare vouloir aller jusqu'à la fin de son mandat au FMI. «Et la fin, c'est 2012», dit-il. Plus précisément, l'automne 2012, alors que l'élection présidentielle est prévue pour le printemps.

Plusieurs de ses partisans ont cependant prévenu qu'il ne fallait pas tirer de déductions trop hâtives de ces déclarations. «À mon avis, il va y aller, il est en train d'y aller», a ainsi assuré le maire de Lyon, Gérard Collomb.

Mais le pacte de non-agression entre trois poids lourds décrit par Martine Aubry fait peser un doute sérieux sur le projet de primaires à l'américaine échafaudé par les socialistes.

Le but était de dépasser les divisions et de moderniser le parti, en permettant le renouvellement des personnalités et en assurant une légitimité populaire au candidat. Ces primaires devraient être ouvertes à un corps électoral large, composé de ceux qui se diraient sympathisants du PS et pouvant atteindre plusieurs centaines de milliers de personnes.

Le calendrier prévoit un dépôt des candidatures avant l'été, puis le choix du candidat à l'automne 2011.

«Une élection présidentielle, ce n'est pas un arrangement», a dénoncé jeudi François Hollande, l'ancien premier secrétaire du parti, qui dit préparer une candidature à ces primaires. «Les pactes, ça vaut pour ceux qui les signent, pas pour ceux qui n'en sont pas», a-t-il ajouté.

Le député Pierre Moscovici, de son côté, s'est étonné que l'on puisse ainsi «ouvrir» les primaires et «sembler les fermer».

L'entente entre les trois favoris, sexagénaires ou proches de l'être, exaspère aussi les plus jeunes des responsables socialistes.

Deux quadragénaires, Manuel Valls et Arnaud Montebourg, sont pour l'instant les seuls candidats sérieux aux primaires. Le premier appartient à l'aile droite du parti. Le second, plus à gauche, vient tout juste de se déclarer.