Après des semaines de discussions ardues sur les mérites respectifs de l'arme nucléaire et d'un bouclier antimissile, la France et l'Allemagne ont fini par trouver vendredi un compromis permettant aux deux pays d'affirmer qu'ils ont préservé l'essentiel.

Dans les discussions préparatoires, Paris insistait sur le caractère uniquement complémentaire du bouclier antimissile, tandis que Berlin souhaitait que l'Otan s'engage plus franchement dans le désarmement nucléaire.

 

L'Otan, dans son nouveau «concept stratégique» adopté vendredi, balance entre ces deux extrêmes.

L'Alliance atlantique se dit déterminée à «créer les conditions d'un monde sans arme nucléaire», appuyant l'option zéro promue par le président américain Barack Obama en avril 2009 à Prague. Mais elle «reconfirme que tant qu'il y aura des armes nucléaires dans le monde», elle «restera une alliance nucléaire».

Si la défense antimissile est «l'un des éléments centraux» de la défense collective et si, fait nouveau, un recours à l'arme nucléaire est jugé «extrêmement improbable», néanmoins, les arsenaux américains, français et britanniques sont considérés comme représentant une «garantie suprême» de la sécurité des alliés.

Au départ, la France voulait surtout empêcher l'Allemagne d'obtenir que la défense antimissile se substitue progressivement à la dissuasion nucléaire.

La présidence française a donc estimé que «le texte sur lequel on s'est mis d'accord parle du bouclier antimissile qui renforce la dissuasion nucléaire».

«Notre objectif, a déclaré à l'AFP la même source, est de renforcer la dissuasion en tant qu'élément central de notre défense collective (...) Le problème est réglé, la dissuasion nucléaire reste le coeur de la stratégie de l'Otan et le bouclier antimissile vient renforcer la dissuasion».

Le ministre allemand des Affaires étrangères, le libéral Guido Westerwelle, qui a le plus fortement milité en faveur de la thèse antinucléaire, a pour sa part estimé que «les Allemands» pouvaient «être très satisfaits de la position que nous avons introduite» dans le texte du concept.

Il avait réclamé en février dernier que soit évoquée la possibilité d'un retrait des quelques dizaines de bombes atomiques américaines encore stockées en Allemagne, et dans le reste de l'Europe.

Toutefois l'Otan, sous la pression américaine, avait convaincu Berlin de renoncer temporairement à cette revendication pour ne pas faire une concession unilatérale à la Russie. Washington souhaite amener Moscou à négocier une réduction du nombre de ses propres armes tactiques nucléaires à courte portée (obus et missiles), beaucoup plus nombreuses.

La chancelière Angela Merkel a souligné qu'«il n'y avait pas de difficultés entre l'Allemagne et la France, au contraire».

«Le désarmement est fondé à mon sens, à notre sens en Allemagne, aussi sur le fait qu'il est réciproque, ce qui signifie que les autres doivent eux aussi désarmer», a-t-elle poursuivi.

«Et c'est pourquoi, a-t-elle conclu, je ne vois pas de contradiction entre bouclier antimissile et désarmement, ce sont deux choses qui doivent être réalisées».