Des homosexuels s'embrassant à pleine bouche, des adolescents agitant le drapeau jaune et blanc du Vatican, des fervents venus «voir le pape en vrai»: une foule bigarrée a accueilli dimanche à Barcelone Benoit XVI, au dernier jour de sa visite en Espagne.

Au moment de l'apparition de la papamobile vers 09h00, aux cris de «Viva el Papa» de ses supporters se sont mêlés les «Fuera!» (va-t-en!) et «Pederasta» (pédophile) d'un groupe de 200 homosexuels, eux aussi placés contre les balustrades, devant la cathédrale, qui jouxte l'archevêché où le pape a dormi.

Alors que le pape passait devant eux, ils ont pris leur élan pour des baisers passionnés qui ont duré près de cinq minutes, sur lesquels Benoît XVI a jeté un regard furtif.

Sergi Diaz, qui a participé à cette flashmob (manifestation éclair), expliquait être «ici pour manifester contre la visite du pape» et «lancer un appel à un changement de mentalité dans l'enseignement catholique qui garde une attitude opposée à nos droits et aux différentes manières d'aimer».

Pour Helena Coll, 26 ans, venue avec son amie Rebecca, «les religions parlent de paix, d'humanité et de respect, mais après ces valeurs sont bafouées».

Ce groupe s'est retrouvé pendant quelques minutes face à face avec les supporteurs du pape, qui eux agitaient des drapeaux aux couleurs jaunes et blanches du Vatican.

«Ils ne comprennent pas ce qu'est réellement l'Église, parce qu'elle n'est pas contre les homosexuels, bien au contraire», soupirait Daniel Colado, séminariste de 25 ans.

«C'est une expérience qui ne va jamais se répéter dans notre ville», racontait Adriana Mayner, 18 ans, les yeux fatigués par une nuit sans sommeil, à attendre le pape devant la cathédrale. Voir Benoît XVI représente «énormément de choses, surtout la joie», expliquait-elle.

Arrivée dimanche à 7 heures, Maria José Corbella, 65 ans, se disait «très émue de voir le Saint Père», regrettant qu'aujourd'hui en Espagne, «la foi soit en train de se perdre», surtout «chez les jeunes».

Comme elle, plusieurs centaines de personnes, dont beaucoup d'enfants et d'adolescents, se pressaient en début de matinée devant l'édifice, certains chantant et dansant en cercles, au rythme des guitares et des tambourins.

«Benet XVI», comme il est appelé en catalan, a parcouru en une trentaine de minutes le chemin qui sépare la cathédrale Sainte-Eulalie, oeuvre gothique typiquement médiévale, et la basilique de la Sagrada Familia, symbole du modernisme catalan et chef d'oeuvre inachevé de Gaudi.

«Je l'ai vu passer, ça valait vraiment la peine», s'exclamait Maria Vera, 30 ans, venue de Tarragone, à une heure de Barcelone. «Le voir en vrai, c'était très émouvant».

Il a ensuite célébré la consécration de la basilique lors d'une messe à laquelle assistaient 6500 personnes à l'intérieur du bâtiment, tandis que 51 000 chaises étaient disposées à l'extérieur pour suivre la cérémonie sur écran géant. Plusieurs écrans étaient aussi placés dans les rues alentours, noires de monde.

Mélange de rondeurs et de clochers pointus, percée de nombreuses ouvertures en formes de sablier (hyperboloïdes) et colorée de touches de mosaïques selon la méthode trencadis, la Sagrada Familia, en chantier depuis la pose de la première pierre en 1882, est le monument-emblème de la capitale catalane.

Sa consécration fait figure d'hommage posthume à Gaudi, fervent catholique dont le procès en béatification a été ouvert par le Vatican en 2003, ses partisans espérant une issue positive en 2016, pour les 90 ans de sa mort.

Après avoir goûté au déjeuner une traditionnelle crème catalane, le pape devait, dans l'après-midi, bénir la première pierre d'un nouvel établissement pour enfants handicapés mentaux, construit par la fondation Nino Dios, liée à l'Église.

Photo: Gustau Nacarino, Reuters

Alors que le pape passait devant eux, des centaines de militants gais ont pris leur élan pour des baisers passionnés qui ont duré près de cinq minutes, sur lesquels Benoît XVI a jeté un regard furtif.