Viktor Tchernomyrdine, ancien premier ministre russe et l'une des dernières grandes figures politiques de l'époque du défunt président Boris Eltsine, est décédé mercredi à l'âge de 72 ans, ont rapporté les agences russes en citant ses proches.

Tchernomyrdine a dirigé le gouvernement russe de 1992 à 1998, période noire pour la Russie qui peinait à sortir du marasme économique hérité de la chute de l'URSS.

Il était une «personne extraordinaire que l'histoire a fait avancer à un poste-clé en un moment très difficile pour la Russie», relève ainsi l'ancien ministre russe de l'Économie, Evgueni Iassine, à l'antenne de la radio Echo de Moscou.

«Sans lui, le peuple russe aurait actuellement une vie différente», a estimé, de son côté, le chef du conglomérat russe Rosnano, Anatoli Tchoubaïs, qui travaillait dans le gouvernement de Tchernomyrdine.

Viktor Tchernomyrdine était aussi aux commandes alors que la Russie s'embourbait dans le premier conflit indépendantiste tchétchène et découvrait les prises d'otages massives par des commandos rebelles.

En juin 1995, il marque les esprits lors de la prise d'otages dans un hôpital de Boudenovsk (sud de la Russie), gérant personnellement la crise, en négociant au téléphone et devant les caméras avec le chef des assaillants, le redoutable Chamil Bassaïev, à qui il lance alors «Allo! Chamil Bassaïev? Parlez plus fort!»

«On dit maintenant qu'on ne peut pas négocier avec les terroristes, mais lui a commencé des négociations pour sauver les otages. Il a pris un risque et ses responsabilités», a déclaré un défenseur des droits de l'Homme russe, Lev Ponomarev, cité par l'agence Interfax.

Co-fondateur du parti de Eltsine, «Notre maison est la Russie», Tchernomyrdine était connu pour ses expressions fleuries.

Aux commandes lors des grandes réformes économiques après la disparition de l'URSS, il déclare notamment alors «Je suis pour le marché, mais non pas pour le bazar».

Autre phrase fameuse, il commente ces réformes en 1993 de la manière suivante : «On voulait faire pour le mieux, mais finalement on a fait comme d'habitude».

Avec l'arrivée de Vladimir Poutine à la tête du gouvernement en 1999 puis au Kremlin en 2000, Viktor Tchernomyrdine quitte le devant de la scène politique russe.

À l'époque soviétique, cet ancien ouvrier originaire de la région d'Orenbourg, à la frontière avec le Kazakhstan, a fait une carrière classique d'apparatchik spécialisé dans l'industrie.

En 1985, il devient ministre de l'Industrie gazière de l'URSS. Il retrouvera le gaz en 1999 en prenant la tête du géant russe du secteur, Gazprom, jusqu'à sa nomination comme ambassadeur en Ukraine en 2001.

En 2009, après notamment une grave crise gazière russo-ukrainienne, il est rappelé à Moscou, alors qu'il risquait de devenir persona non grata en Ukraine en raison de ses déclarations jugées «inamicales» par Kiev.

Il devient alors conseiller et représentant spécial du président russe Dmitri Medvedev pour la coopération économique avec les pays membres de la Communauté des États indépendants (ex-URSS, moins les pays baltes et la Géorgie).

MM. Medvedev et Poutine ont exprimé leurs condoléances à la famille de M. Tchernomyrdine, ont annoncé leurs services de presse.

Il sera enterré au célèbre cimetière de Novodevitchi à Moscou, où repose son épouse décédée plus tôt cette année ainsi que Boris Eltsine et de nombreuses personnalités russes, a indiqué la télévision russe.