Le chef nationaliste flamand Bart De Wever a 10 jours pour jeter les bases d'une nouvelle Belgique où la Flandre aura plus d'autonomie et démontrer que son objectif immédiat n'est pas l'éclatement du pays comme le craignent les francophones.

Le leader de la Nouvelle alliance flamande (N-VA), le parti indépendantiste sorti vainqueur côté néerlandophone des législatives du 13 juin, avait provoqué le 4 octobre la rupture des tractations menées depuis une centaine de jours avec six autres partis pour former un gouvernement.

Jugeant qu'elles menaient à une impasse, il a exigé qu'elles repartent à zéro.

Selon M. De Wever, qui avait réclamé sans succès pour les régions de Flandre, Bruxelles-Capitale et Wallonie le droit de lever une moitié des impôts sur le revenu, compétence jusqu'ici dévolue au pouvoir fédéral, ses interlocuteurs francophones n'ont pas pris la vraie mesure de sa détermination à transformer l'État belge dans un sens «confédéral».

Après avoir consulté M. De Wever ainsi que les dirigeants des autresformations flamandes (SPA socialiste, CDV chrétien-démocrate et Groen écologiste) et francophones (PS, centristes du CDH et Ecolo) engagées dans ces négociations, le roi Albert II lui a donc confié vendredi soir une mission de «clarification».

Le chef de la N-VA a beaucoup de cartes en main, mais sa mission est étroitement cadrée, même s'il a fait savoir qu'il parlerait avec qui il voudrait.

D'abord, le souverain lui a donné 10 jours pour dénouer la crise, et il devra rendre compte de sa mission dès le 18 octobre.

Ensuite, M. De Wever n'aura pas en principe le choix de ses interlocuteurs puisqu'il s'agit des six mêmes partis.

Il est pourtant notoire que le chef de la N-VA aimerait faire rentrer dans le jeu les libéraux francophones du MR, avec lesquels il se sent plus d'atomes crochus idéologiques.

Enfin, l'homme fort de la Flandre n'aura pas en principe loisir de déborder de l'ordre du jour qui lui a été fixé par le Palais: il doit tenter de «rapprocher les points de vue» sur quatre sujets-clés, pas un de plus.

Il est vrai que parmi ces sujets, le statut des francophones de la banlieue de la capitale, dans le secteur dit de «Bruxelles-Hal-Vilvorde» (BHV), est un casse-tête jusqu'à présent insoluble et générateur de troubles.

Le problème des finances insuffisantes de Bruxelles, enclave francophone et capitale à la fois de la Flandre et de la Belgique, est également récurrent.

M. De Wever, qui sait la riche Flandre lassée de payer pour les francophones de Bruxelles et de Wallonie, a refusé un transfert annuel de 500 millions d'euros en sa faveur, en exigeant plus de «garanties» sur son utilisation.

Il est d'ailleurs récompensé de sa fermeté. Un sondage lui accorde la sympathie du tiers des 6,2 millions de Flamands (sur 10,5 millions de Belges), alors que son parti avait recueilli 28% des voix en juin.

Les deux autres sujets -les transferts de compétences du pouvoir fédéral aux régions et la future loi de finances- ne sont pas moins déterminants pour l'avenir de la Belgique.

Dans ces conditions, les francophones se préparent au choc.

La dirigeante du CDH centriste, Joëlle Milquet, qui avait eu comme les autres leaders francophones des mots très durs pour M. De Wever lorsqu'il avait décidé de stopper les négociations, affirme au journal bruxellois Le Soir daté de samedi que le chef flamand devra «changer d'attitude».

En attendant, le gouvernement sortant d'Yves Leterme, qui expédie les affaires courantes depuis le 22 avril, a été prié de se préparer à rester en fonctions encore plusieurs mois et de «faire le maximum» pour l'économie du pays.