Le comité pour l'élimination de la discrimination raciale de l'ONU (CERD) a appelé vendredi la France à «éviter» les renvois collectifs de Roms, s'inquiétant de «discours politiques discriminatoires» dans le pays.

Dans une série de recommandations publiées vendredi, à la suite de l'examen de la situation de la France envers ses minorités mi-août, les 18 experts du CERD se disent globalement préoccupés par «la tenue de discours politiques de nature discriminatoire en France» qui s'inscrivent en parallèle avec «une augmentation récente des actes et manifestations à caractère raciste et xénophobe».

Ils s'inquiètent plus particulièrement du sort des Roms, victimes d'une «montée (...) des violences à caractère raciste».

Dénonçant les derniers renvois massifs de Roms en Bulgarie et en Roumanie, sans «leur consentement libre, entier et éclairé», ils demandent à la France «d'éviter en particulier les rapatriements collectifs» et «d'oeuvrer à des solutions pérennes».

«C'est la question du jour», a expliqué le rapporteur pour la France, l'Américain Pierre-Richard Prosper, regrettant que la France «donne le sentiment» qu'elle n'étudie pas au cas par cas chaque situation et vise «un groupe» plutôt que des individus.

Ces remarques du comité onusien viennent s'ajouter au vent de contestation en France et à l'étranger (Commission européenne, Conseil de l'Europe, Vatican) contre le virage sécuritaire annoncé fin juillet par le président français Nicolas Sarkozy, qui a enclenché une vague de renvois de population rom ainsi que le démantèlement de camps illégaux ces dernières semaines.

Le chef de l'État avait également réclamé dans un discours prononcé à Grenoble la déchéance de la nationalité française pour meurtre de policier ou pour polygamie et lié délinquance et immigration, en visant directement les Roms et les gens du voyage.

Le CERD a réagi vivement à ces sujets d'actualité.

Concernant les gens du voyage, il a réclamé une nouvelle fois «l'abolition des titres de circulation» qui oblige ces personnes à obtenir un visa de circulation auprès de la police tous les trois mois. Cette demande avait été déjà formulée lors du dernier examen de la France par le comité en 2005.

Cette fois, les experts onusiens donnent à Paris un an pour prendre des mesures adéquates sur le sujet ainsi que sur la question des Roms.

Enfin, en allusion directe à la volonté gouvernementale de retirer la nationalité française en cas de délit grave, le CERD se dit «préoccupé par des informations selon lesquelles des mesures pourraient être prises dans les domaines de la citoyenneté avec des conséquences discriminatoires fondées sur l'origine nationale».

Ces recommandations et remarques surviennent deux semaines après l'examen approfondi de deux jours de la France devant ce comité chargé de suivre l'application de la convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale de 1965.

La délégation française y avait annoncé le 11 août la création très attendue d'un plan national de lutte contre le racisme.

Malgré ce pas en avant salué par les experts, ces derniers s'étaient montrés très virulents contre Paris, fustigeant un «manque de volonté politique» face à une recrudescence inquiétante du racisme dans le pays.