La France a renvoyé jeudi vers Bucarest près d'une centaine de Roms, premières expulsions depuis l'annonce par le président Nicolas Sarkozy de mesures sécuritaires visant cette population pour laquelle la Roumanie réclame un plan d'intégration européen.

Une soixantaine de Roms ayant accepté l'Aide au retour humanitaire ont décollé à bord d'un avion de la compagnie roumaine Blue Air à 12H55 (10H55 GMT) de l'aéroport de Lyon, a constaté un journaliste de l'AFP.

Arrivés sous escorte policière à bord de deux autocars, ces Roms, parmi lesquels des femmes et des enfants, ont été enregistrés dans le calme avant d'embarquer.

Selon le ministère roumain de l'Intérieur, un total de 93 Roms seront rapatriés jeudi sur plusieurs vols réguliers, depuis Paris et Lyon. La France n'a pas confirmé le chiffre.

«Chacune des personnes éloignées a fait l'objet d'un examen individuel quant aux conditions de son séjour en France», a assuré le gouvernement français, en réponse à la Commission européenne, qui a rappelé que Paris «doit respecter les règles» sur la liberté de circulation et d'établissement dans l'Union européenne.

Le président roumain Traian Basescu a réclamé jeudi un programme européen d'intégration des Roms, une demande formulée par la Roumanie depuis 2008, alors que la presse roumaine notait qu'en l'absence d'un programme de réinsertion cohérent, nombre des rapatriés repartiraient.

«J'invite la Commission européenne à mobiliser son énergie, ses efforts, ses crédits dans des programmes de réinsertion durable et d'intégration effective de la communauté Rom», a déclaré peu après le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux.

D'ici la fin du mois, Paris envisage le retour de 700 Roms après le démantèlement d'une cinquantaine de camps depuis le durcissement de la politique gouvernementale fin juillet. Deux nouveaux camps illicites ont été évacués jeudi.

À la suite d'un fait divers qui concernait des tziganes français, le gouvernement avait annoncé le démantèlement de la moitié des camps illégaux en France dans les trois mois et une reconduite vers la Bulgarie ou la Roumanie des Roms ayant «commis des atteintes aux biens ou des fraudes».

Les Roms partis jeudi ont accepté l'aide au retour volontaire proposée de la France: 300 euros par adulte et 100 euros par enfant mineur.

Il s'agit du 25e rapatriement de ce type depuis le début 2010.

Bucarest et Sofia ayant rejoint l'UE en 2007, leurs ressortissants peuvent en effet rester en France durant trois mois sans avoir à justifier d'une activité. Au-delà, ils doivent avoir un emploi, suivre des études ou justifier de ressources suffisantes.

Les Roms seraient 15 000 en France où ils vivent souvent dans des squats, accusés pour certains par les autorités de se livrer à divers trafics ou d'exploiter des enfants à des fins de mendicité.

Cette question provoque des tensions entre Paris et Bucarest, le ministre des Affaires étrangères Teodor Baconschi s'étant déclaré inquiet des «risques de dérapage populiste» et de «réactions xénophobes».

Les Roms sont entre 530 000 et 2,5 millions en Roumanie. Si Bucarest a fait des progrès dans l'accès à l'éducation, les Roms souffrent encore de discriminations sur le marché du travail et dans le domaine du logement.

Dans le quotidien Libération, Robert Kushen, directeur du Centre européen pour les droits des Roms, déplore que «le gouvernement français (les) instrumentalise pour montrer sa poigne sur les questions d'ordre».

Paris a aussi été critiqué à l'ONU sur cette question, et plus généralement sur le lien établi entre immigration et insécurité par M. Sarkozy.

Photo: Reuters

Les Roms qui partent jeudi ont accepté l'aide au retour volontaire proposée de la France: 300 euros et 100 euros par enfant mineur.