L'embargo sur les exportations de céréales est entré en vigueur dimanche en Russie, le gouvernement cherchant ainsi à contenir la hausse des prix engendrée par l'effondrement des récoltes en raison de la canicule, et éviter tout risque de troubles liés au coût des denrées de base.

Décidée par le premier ministre Vladimir Poutine qui a signé un décret gouvernemental en ce sens le 5 août, cette mesure d'exception s'appliquera du 15 août au 31 décembre. Elle pourrait être étendue au-delà de cette date en fonction de l'état de la récolte.

Troisième exportateur mondial de blé, la Russie a déjà abaissé à 60-65 millions de tonnes sa prévision de récolte de céréales pour 2010, contre 97 millions de tonnes en 2009.

L'année dernière, le pays avait exporté 21,4 millions de tonnes de céréales et lancé une importante campagne pour augmenter ses parts de marchés à l'international.

Or, selon le président russe Dmitri Medvedev, près d'un quart des cultures de céréales ont été perdues en raison de la sécheresse et de la canicule qui frappent le pays, et l'état d'urgence a été décrété dans 27 régions agricoles.

Soucieux d'écarter tout risque de troubles sociaux en raison d'une hausse brutale des prix des aliments, les dirigeants russes souhaitent, grâce à l'embargo, assurer l'approvisionnement des marchés intérieurs et éviter une envolée des prix.

«Il faut empêcher l'inflation des prix intérieurs et également sauver le cheptel russe» qui risquerait d'être abattu en cas de manque de nourriture en raison de prix intérieurs trop élevés sur les céréales, avait expliqué Vladimir Poutine en annonçant la mesure.

La consommation intérieure de céréales en Russie est d'environ 78 millions de tonnes. Selon le gouvernement, le pays peut compter sur une réserve de 9,5 millions de tonnes détenues par l'Etat et sur 21 tonnes issues de la récolte de 2009.

Le président Medvedev a reconnu la semaine dernière que les acteurs du marché comme les simples citoyens étaient inquiets des «conséquences de cet été extraordinairement difficile sur les prix de la plupart des aliments de base».

Il a assuré que les autorités ne permettraient pas une envolée des prix et surveilleraient avec attention l'évolution des coûts de la farine, du pain, de la viande et du lait.

L'annonce de l'embargo début août a provoqué un emballement des prix du blé sur les marchés financiers mondiaux, inquiets des risques de pénurie.

Vladimir Poutine a balayé les critiques et averti que la mesure pourrait être prolongée. «Ce n'est pas la peine de compter sur un retrait rapide de l'embargo», a-t-il mis en garde, ajoutant que ceux qui attendaient la date du 31 décembre le faisaient «en vain».

Des critiques se sont aussi élevées à l'intérieur du pays, certains estimant qu'il faudra des années au pays pour regagner ses positions sur les marchés internationaux.

«Nous avons mis les producteurs qui exportent dans une situation difficile (...) Nous devons les aider à prouver que c'était un cas de force majeure et qu'il ne leur était pas possible de faire leur livraisons», a reconnu Dmitri Medvedev.

«Même si les températures reviennent rapidement à des normales saisonnières, les répercussions se feront certainement sentir en 2011, la canicule et la sècheresse ayant rendu les semailles pour l'hiver problématiques voire impossibles», estime un expert de Renaissance Capital.